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Le coût du caribou forestier

Depuis l’ajout du caribou forestier à la liste des espèces menacées, le gouvernement du Québec a fait des efforts considérables pour protéger son habitat, notamment en limitant l’accès des entreprises forestières à la forêt publique.

Toutefois, les groupes écologistes et certaines organisations gouvernementales réclament d’avantage de restrictions sans même que les coûts économiques ne soient considérés.

Le nouveau Plan de rétablissement du caribou forestier, dont l’entrée en vigueur est prévue en 2018, vise à accroître et à maintenir la population québécoise de caribou forestier à 11 000 individus sur son aire de répartition actuelle, en imposant de nouvelles restrictions encore plus sévères sur l’exploitation forestière. Si le gouvernement va de l’avant avec ce plan proposé par l’Équipe de rétablissement du caribou forestier, des milliers d’emplois seront perdus, alors que le secteur se remet à peine d’une crise.

Étant donné la répartition régionale des populations de caribous et des volumes de bois non récoltés, ce sont les régions du Saguenay-Lac-Saint-Jean et de la Côte-Nord qui seraient principalement affectées, la baisse de la récolte correspondant à des pertes respectives de 2701 et 230 emplois. La diminution annuelle du PIB équivaudrait à 339 millions de dollars pour le Saguenay-Lac-Saint-Jean et 29 millions pour la Côte-Nord.

Pour donner une idée de l’ampleur du sacrifice, la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean devrait renoncer à l’équivalent de 117 emplois et de 14,7 millions de dollars par année pour la sauvegarde incertaine de chaque caribou. Pour la région de la Côte-Nord, le coût économique serait moindre, mais tout de même de 8 emplois et de 0,9 million de dollars.

Bien que l’imposition de ces restrictions implique inévitablement une baisse de la récolte forestière et, par le fait même, des pertes d’emplois, il existe un niveau d’incertitude considérable quant à l’évaluation et l’atteinte des objectifs de conservation.

Non seulement la taille des hardes de caribous est-elle méconnue, du fait que seulement 30 % de l’aire de répartition du caribou a été inventoriée, mais les scientifiques ont du mal à comprendre les variations de population.

Par exemple, en 1999 et 2012, le ministère des Ressources naturelles du Québec a mené des inventaires de population sur le territoire du Saguenay–Lac-Saint-Jean, ce qui a permis de comparer pour la première fois l’état des populations dans le temps sur une même superficie. On a pu constater que la population a plus que doublé entre les deux inventaires en dépit d’un fort taux de perturbation pas les activités humaines, passant de 115 à 247 bêtes, sans que des conclusions claires sur les causes ne puissent en être tirées.

Même si l’on arrêtait complètement l’exploitation forestière, il est donc tout à fait possible que la tendance à la baisse des populations se poursuive à cause de facteurs comme les changements climatiques, les feux de forêt, les épidémies d’insectes et la chasse.

Personne ne conteste la nécessité de mettre en place des mesures de conservation pour protéger la biodiversité. Cependant, il est crucial qu’elles aient des effets positifs concrets sur l’environnement et que les coûts qu’elles entraînent ne soient pas disproportionnés par rapport aux objectifs. Sinon, il s’agit d’un exercice futile aux conséquences désastreuses pour les travailleurs et les populations touchés.

C’est toutefois ce qui risque de se passer si le gouvernement décidait de mettre en œuvre tel quel le Plan de rétablissement du caribou forestier.

Le premier ministre Couillard a déjà mentionné qu’il ne « sacrifierait pas une seule job dans la forêt pour les caribous ». Des solutions plus réalistes, basées sur une meilleure connaissance de l’évolution des populations de caribous, devront donc vraisemblablement être trouvées.

Jasmin Guénette is Vice President of the Montreal Economic Institute. Alexandre Moreau is a Public Policy Analyst at the MEI. The views reflected in this column are their own.

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