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L’État est fauché, mais les subventions pullulent

Les coffres de l’État se vident. La dette explose. Les politiciens se préparent à hausser vos tarifs d’Hydro-Québec, la TVQ, les péages, et probablement vos impôts… Mais on peut tout de même s’endetter un peu plus, non?

On apprenait la semaine dernière que le développeur de jeux vidéo californien THQ vient s’implanter à Montréal. Le gouvernement l’a attiré avec une subvention directe de 3 millions $. À cela s’ajoute un crédit d’impôt d’environ 30% sur les salaires que devra payer l’entreprise. Les développeurs multimédias installés à Montréal profitent tous de ce crédit d’impôt. Chaque fois qu’ils déboursent un dollar de salaire pour un employé, l’État leur donne 30 cents, qu’il pige dans vos poches. Cette politique, mise en place en 1997 par Bernard Landry, visait à créer un «pôle du multimédia» à Montréal.

Pourquoi s’énerver pour un petit trois millions, dites-vous? Parce qu’à force de vouloir créer des «pôles» à droite et à gauche, les millions s’accumulent. Une récente étude du chercheur Mark Milke sur les subventions aux entreprises canadiennes braque les projecteurs sur un fait peu connu: le Québec est le champion incontesté de l’aide sociale aux entreprises. Nos politiciens ont versé plus de 6 milliards aux entreprises en 2007. Cette somme inclut les subventions directes et les prêts à long terme – souvent sans intérêt. C’est près de 1500 $ par contribuable. Trois fois plus qu’en Ontario, qui compte pourtant beaucoup plus d’entreprises. Et ce montant exclut les crédits d’impôt, un des bonbons favoris de notre ministère du Développement économique. En incluant ces crédits, la facture totale grimperait bien au-delà de 7 milliards $ – l’équivalent de la moitié du budget de l’Éducation.

Mais bon. Ce sont des «placements», nous assure-t-on. Qui vont générer richesse et emplois pour tous! Vraiment? On apprenait la semaine dernière que l’avionneur Bombardier commence à s’inquiéter de l’absence de commandes fermes pour son avion CSeries. Rappelez-vous il y a deux étés. Nos gouvernements allongeaient quelque 500 millions $ à cette entreprise – sous forme de prêts à intérêt faible (voire nul), remboursables seulement si l’entreprise vend des avions – pour l’aider à développer cet appareil. Les politiciens claironnaient: nous allons créer plus de 3500 emplois! Or, depuis cette annonce, Bombardier a plutôt licencié quelque 3000 travailleurs dans la région de Montréal. Et l’avionneur sous-traite une part grandissante de sa production au Mexique.

Les subventions aux entreprises, et de façon plus large les politiques industrielles – l’idée d’encourager l’industrie X au lieu de l’industrie Y – sont inefficaces. En subventionnant une entreprise, l’État lui permet de consommer des ressources et de la main-d’oeuvre, qui deviennent indisponibles pour les autres entreprises. Et comme l’État ne peut «encourager» de cette façon toutes les industries, cette politique nuit aux nombreuses entreprises qui n’ont pas la chance – ou les bons contacts – d’obtenir la subvention.

Les économistes ont depuis longtemps rejeté les prétendus bienfaits des politiques industrielles. Celles-ci servent plutôt à assouvir les rêves de grandeur du politicien du jour, et lui permet de s’acheter des votes (avec l’argent des contribuables) en donnant l’impression de créer des emplois. Gardons en tête que le gouvernement ne crée pas la richesse. Il la redistribue. Et, trop souvent, de votre portefeuille aux poches de ses groupes d’intérêts favoris.

Le pire, c’est qu’une crise des finances publiques ne semble pas être une raison valable pour cesser ce petit jeu.

David Descôteaux is an Economist at the Montreal Economic Institute.

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