Les PPP: il y a des conditions
N.D.L.R. – Le gouvernement Charest veut développer des partenariats avec des entreprises pour la fourniture de certains services. Le professeur Léo-Paul Lauzon s’y opposait hier farouchement dans nos pages. Nous avons demandé au président de l’Institut économique de Montréal, Michel Kelly-Gagnon, de lui donner la réplique.
Mis en place par des gouvernements aussi bien de gauche que de droite partout dans le monde, les partenariats public-privé (PPP) présentent des avantages significatifs lorsqu’ils sont bien gérés.
Les PPP permettent tout d’abord d’améliorer les services publics. À l’encontre des monopoles publics actuels souvent lourds et inefficaces, les fournisseurs sont sélectionnés par des procédures d’appel d’offres. Grâce à la concurrence entre soumissionnaires, cela permet d’identifier les entreprises les plus efficaces et les projets les mieux adaptés. Les pouvoirs publics sont ainsi en mesure de réaliser des baisses de coûts et des économies substantielles. Exactement comme le propriétaire qui fait jouer la concurrence entre les différents fournisseurs pour avoir le meilleur prix quand il entreprend des travaux importants dans sa maison.
Ensuite, les PPP permettent de réduire les risques de l’État dans les grands projets d’infrastructure et d’équipement, liés par exemple aux dépassements de coûts et aux retards par rapport à l’échéancier. Une partie des risques sont transférés aux partenaires privés dont la rémunération dépend de leur bonne gestion. Les entrepreneurs privés sont alors beaucoup plus motivés à surveiller et à éviter les pépins majeurs que des fonctionnaires dont l’emploi n’est pas en jeu et qui peuvent toujours demander des augmentations de budget pour couvrir les dépassements.
Enfin, grâce aux PPP, l’État est en mesure de bénéficier d’une expertise onéreuse déjà développée par des partenaires privés qui oeuvrent dans un domaine particulier. Les pouvoirs publics peuvent ainsi se concentrer sur leur rôle principal de fixer les modalités et les caractéristiques des services publics offerts à la population.
Les PPP pourraient trouver une application partout où l’État est fournisseur de biens et de services. Comme par exemple la construction, l’entretien ou l’exploitation d’autoroutes, d’hôpitaux, d’écoles, d’universités, de réseau de transport en commun, de gestion de l’eau etc. Le danger avec le présent projet de loi est cependant de laisser l’initiative aux différents organismes publics de déterminer dans quels cas un PPP peut être envisagé. Or, ces organismes n’aiment pas perdre le contrôle et l’Agence risque de devenir «une coquille vide» faute de propositions intéressantes.
Si nous voulons avoir de meilleurs services grâce aux PPP, il faut évidemment que certaines conditions soient observées. D’une part, il faut que les procédures d’appel d’offres soient transparentes afin que la meilleure proposition soit effectivement retenue. D’autre part, les contrats entre le public et le privé doivent clairement définir leurs responsabilités respectives. Les prestataires privés doivent ainsi savoir exactement ce qu’on attend d’eux et à quel coût.
Il ne faudrait pas croire en effet que les PPP sont une panacée. Les modes de gestion des secteurs public et privé diffèrent grandement et il n’est pas évident de les faire coexister dans un même projet. Il existe aussi de nombreux exemples à travers le monde de PPP qui ont mal tourné. Des gestionnaires privés qui doivent prendre des décisions dans un contexte où les incitations habituellement fournies par la concurrence n’existent pas ne seront pas nécessairement plus efficaces que des fonctionnaires.
L’État devrait clairement se désengager de certains secteurs où il n’est tout simplement pas efficace ou n’a pas de rôle à jouer. Mais si le gouvernement met plutôt en place un PPP mal fignolé par crainte des réactions que provoquerait une privatisation, on ne doit pas s’attendre à des miracles.