Nos enfants méritent les enseignants les plus compétents
On apprenait mercredi que la Commission scolaire de Rouyn-Noranda, qui avait congédié trois enseignantes pour incompétence, sera forcée de leur redonner leur poste et de les compenser pour les trois années depuis leur mise à pied.
La facture? 600 000 $ en salaires pour les enseignantes qui ont eu gain de cause et 165 000 $ en frais juridiques. Ces montants sont, évidemment, assumés par les contribuables. Parions que les commissions scolaires y repenseront à deux fois avant de tenter de mettre à la porte du personnel incompétent.
Notons qu’une des enseignantes a manqué 49 % des jours de classe depuis 14 ans, et que les deux autres cumulaient les plaintes de la part des parents et des élèves.
On ne connaît pas tous les détails de ces cas particuliers, et peut-être y avait-il de bonnes raisons pour réintégrer ces enseignantes. Mais l’affaire rappelle une fois de plus une réalité inquiétante de notre système d’éducation : il est très, très difficile de congédier un enseignant pour incompétence au Québec.
Entre 2010 et 2015, sur un total de près de 60 000 enseignants permanent travaillant pour les commissions scolaires de la province, un grand total de… sept ont été congédiés pour incompétence, révélait en 2016 une publication de l’IEDM dont les données ont été obtenues grâce à une demande d’accès à l’information aux 72 commissions scolaires québécoises. C’est à peine plus d’un par année pour tout le Québec, ou 0,012 % de tous les enseignants permanents.
Cette proportion apparaît dérisoire puisque les congédiements d’enseignants incompétents sont aussi rares que ceux impliquant des enseignants violents ou criminels (sept cas en tout), ou encore pour des agissements de nature sexuelle (sept cas aussi). Ou bien nos enseignants sont presque tous extraordinairement compétents, ou bien on peine à se débarrasser du bois mort. Malheureusement, la deuxième option semble la plus plausible.
Un mécanisme de congédiement des enseignants incompétents existe en théorie, mais le processus est long et complexe. De plus, les procédures habituelles font en sorte qu’après l’octroi de la permanence, une majorité d’enseignants ne sont plus évalués sur la qualité de leur travail. Résultat : les congédiements sont presque inexistants.
Les enseignants pénalisés
Nous avons tous un ou une professeure qui nous a marqués et dont on se souvient encore aujourd’hui. Les profs ont une influence durable sur les enfants. S’il y a un domaine où, en tant que société, on veut avoir les gens les plus compétents possible, c’est bien en éducation! On fait grand cas du décrochage scolaire, notamment chez les garçons. Et bien justement, s’assurer d’avoir les meilleurs professeurs serait un pas dans la bonne direction, non?
Si vous connaissez des professeurs, vous savez qu’eux, ou leurs collègues, souffrent eux-mêmes de la présence d’un collègue incompétent. Ces « bons » professeurs profiteraient d’une reconnaissance sociale accrue si les cas problématiques étaient mieux pris en charge. En plus d’aider les bons profs, un mécanisme permettant de congédier les enseignants dont les compétences sont déficientes renforcerait la relation de confiance entre les parents, les directions d’école et les enseignants.
D’autres solutions sont également possibles. Les écoles pourraient faire des évaluations périodiques des enseignants, par exemple aux cinq ans, comme en Ontario. La rémunération au mérite basée sur des évaluations régulières, une pratique courante dans la vaste majorité des professions, devrait aussi faire partie des solutions.
D’ailleurs, un sondage Léger Marketing révélait en 2011 que 67 % des Québécois croient que la performance des enseignants devrait être évaluée et que les meilleurs d'entre eux devraient être mieux rémunérés que leurs collègues moins performants.
Enfin, il serait peut-être aussi bon de rappeler aux syndicats que les élèves et la qualité de l’apprentissage doivent être la première préoccupation de l’éducation. Et non pas la protection d’employés qui ne sont peut-être tout simplement pas à leur place dans la profession d’enseignant.
Jasmin Guénette est vice-président de l'Institut économique de Montréal. Il signe ce texte à titre personnel.
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