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Textes d'opinion

Un syndicat entre la réalité et la fiction

Le film Won't back down (« On ne cédera pas » dans sa version française) raconte l'histoire de Jamie Fitzpatrick, une mère monoparentale dont la ténacité et le courage hors de l'ordinaire la mènent à réclamer une meilleure éducation pour sa fillette dyslexique. Ses tentatives pour trouver une solution se frappent à une enseignante désabusée, à une direction indolente, à une bureaucratie tatillonne et au puissant syndicat des enseignants. Lorsque Jamie s'allie à une enseignante pour reprendre le contrôle de l'école, le syndicat cherche par toutes les tactiques déloyales à bloquer cette initiative afin de protéger la permanence d'emploi des incompétents.

Un syndicat qui s'oppose aux projets de ses propres membres et des parents, sans préoccupation véritable pour les élèves. Un personnage qui déclare même que le syndicat d'enseignants se préoccupera des élèves quand ceux-ci paieront des cotisations syndicales. Réalité ou fiction?

Protéger l'enseignant ou l'élève?

Bien entendu, le syndicat dépeint dans le film est caricatural. Pourtant, lorsque l'IEDM avait lancé l'idée de la rémunération des enseignants au mérite, l'idée avait été particulièrement mal reçue par la Centrale des syndicats du Québec (CSQ). J'avais d'ailleurs débattu du sujet à RDI avec Réjean Parent, alors président de la CSQ (c'était le 8 février 2012). Le débat s'est fait de bonne foi et je respecte beaucoup Réjean Parent. Toutefois, cela ne m'empêche pas de garder de ce débat l'impression que le changement, même s'il est bénéfique pour les élèves, n'est pas toujours le bienvenu. Comme quoi les caricatures recèlent souvent un fond de vérité.

La rémunération au mérite des enseignants favorise la réussite des élèves puisqu'elle récompense les bons enseignants et demande des efforts aux enseignants les moins performants pour s'améliorer. En fin de compte, la rémunération au mérite reconnaît le monde pour ce qu'il est, soit que certains profs sont de meilleurs pédagogues que d'autres, ce que tous les enfants et tous les parents savent depuis des lustres. Or, il semblait à l'époque très ardu pour M. Parent d'accepter l'idée si commune dans les autres professions que les meilleurs puissent être reconnus comme tels et valorisés à juste titre.

M. Parent soulignait aussi que le système public d'éducation répondait très bien aux besoins et qu'un enseignant incompétent pouvait très bien être renvoyé selon les conventions collectives en cours. À une question de l'animateur, Simon Durivage, le président de la CSQ n'avait toutefois pas pu préciser s'il y avait effectivement eu des renvois pour incompétence dans les dernières années. À quel point ce syndicat parvient-il à concilier sa revendication de sécurité d'emploi et de permanence pour les enseignants avec l'objectif d'une éducation de qualité offerte aux élèves? Les taux de décrochages faramineux dans certaines écoles du Québec paraissent-ils si peu urgents qu'on peut continuer dans la voie des petits pas? La CSQ défendrait-elle l'indéfendable?

Urgent besoin de Jamie Fitzpatrick québécoises

J'encourage toutes les Jamie Fitzpatrick québécoises, et les hommes aussi d'ailleurs, à exiger mieux de notre éducation. À cesser de croire les sirènes qui disent que ça ne se peut pas, qu'il n'y a rien à faire, ou qu'il faut faire preuve de patience. Bref, comme le dirait mon patron, il faut cesser d'accepter l'inacceptable.

Youri Chassin est économiste à l'Institut économique de Montréal. Il signe ce texte à titre personnel.

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