Le confinement frappe durement les plus vulnérables
Les Canadiens ont subi en 2020 un triple choc traumatique : sanitaire, politique et économique.
Le choc sanitaire est l’apparition de la COVID-19, un nouveau virus mortel. Le choc politique est l’imposition pendant plusieurs mois d’un confinement strict et généralisé et d’une distanciation physique obligatoire. Le choc économique est l’arrêt forcé de l’activité de tous les commerces dits « non essentiels », les faillites en cascades et le chômage qui s’en suivent, en plus de la nécessité pour les parents qui auraient pu travailler encore de s’occuper de leurs enfants à temps plein.
Ces bouleversements abrupts ne nous affectent pas tous de la même manière. La plupart des Canadiens auront surmonté ces épreuves – évitables ou non – avec courage et dans l’espoir qu’en 2021, elles ne soient plus qu’un lointain souvenir. Leur moral aura quand même été sérieusement malmené, comme le montre l’augmentation de leur automédication (alcool, tabac, cannabis, etc.)[1] et celle de leur perception négative de leur santé mentale[2].
Toutefois, les Canadiens les plus vulnérables (par exemple, ceux qui sont prônes à la dépendance ou aux abus domestiques) n’auront malheureusement pas eu la résilience nécessaire pour survivre aux chocs politique et économique. L’oisiveté forcée, l’afflux d’argent facile[3], l’apparition de drogues de qualité inférieure sur un marché en embargo partiel, la privation de contacts humains et, avec eux, de l’empathie qu’ils auraient pu susciter et de l’aide dont ils auraient pu bénéficier, leur auront été fatales.
Les abus et la maltraitance domestiques sont plus grands et plus fréquents quand on ne peut pas sortir du foyer pour y échapper. L’anxiété et la solitude sont plus aigües en l’absence de travail régulier et d’interactions sociales routinières. Les plus vulnérables parmi nous ont flanché.
Sans pouvoir facilement faire d’activité physique à l’extérieur pour soutenir leur hygiène mentale, ils se sont repliés sur des stratégies d’adaptation « d’intérieur » : la nourriture, l’alcool, le tabac et la drogue. Pris en quantité suffisante et en qualité insuffisante, elles sont sans issue favorable. L’épidémie de décès par surdose d’opiacés l’illustre tragiquement[4].
« Ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort » est un adage de survivant. Pour ceux qui disposent d’une capacité de résilience insuffisante, l’assignation forcée à résidence est l’inverse d’une aubaine. C’est possiblement une condamnation à mort. Clairement, on peut, et on doit, faire mieux pour cibler et calibrer les restrictions liées à la pandémie de sorte à protéger les plus vulnérables parmi nous, au lieu d’avoir recours au confinement généralisé.
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Notes
1. Statistique Canada, « Série d’enquêtes sur les perspectives canadiennes 2 : suivi des effets de la COVID-19, mai 2020 », 4 juin 2020, p. 4-5.
2. Leanne Findlay et Rubab Arim, « Les Canadiens perçoivent leur santé mentale comme étant moins bonne pendant la pandémie de COVID-19 », Statistique Canada, 24 avril 2020, p. 3-4.
3. Anna Desmarais, « Coping with COVID — but at what cost? », CBC News, 7 octobre 2020.
4. John Paul Tasker, « Opioid deaths skyrocket, mental health suffers due to pandemic restrictions, new federal report says », CBC News, 28 octobre 2020.