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Textes d'opinion

Destitution de Donald Trump : les démocrates répètent leurs erreurs

Nombreux sont les commentateurs, éditorialistes, chroniqueurs et journalistes qui font référence aux audiences en cours aux États-Unis tout en manifestant par ailleurs une totale incompréhension des règles et du contexte applicables à une éventuelle destitution du président Trump.

C’est une chose que de détester Donald Trump (à tort ou à raison), mais c’en est une autre que de dire tout et n’importe quoi ou encore de prendre ses fantasmes pour des réalités. Voici donc ce qu’on doit essentiellement savoir à ce sujet.

Une procédure politique ayant (très) peu de chance d’aboutir

La destitution est dès le départ vouée à l’échec. Pour que le président Trump soit reconnu coupable, les deux tiers des sénateurs (soit au moins 67 d’entre eux) doivent conclure à sa culpabilité. Mais puisque les républicains détiennent 53 des 100 sièges du Sénat, il faudrait que 20 sénateurs républicains se liguent contre le président Trump. Un tel revirement de situation est très peu probable compte tenu de la fidélité du parti républicain au président.

En fait, aucune procédure d’impeachment n’a abouti à la destitution d’un président américain. Contrairement à une croyance populaire, le président Nixon n’a pas quitté ses fonctions après avoir été destitué, il a démissionné avant que l’enquête ne soit complétée. De fait, Andrew Johnson et Bill Clinton sont les seuls présidents à avoir fait l’objet d’un vote de destitution, et ils ont été acquittés par le Sénat dans une ambiance moins partisane.

Le processus de destitution doit en effet être vu comme une question politique et non juridique. Néanmoins, les accusations au soutien d’une procédure de destitution doivent être plus substantielles que de simples impolitesses de la part du président.

La véritable cause de la tentative en cours est que la campagne pour les élections de 2020 a débuté, et cette procédure a pour but d’affaiblir le président et son camp. Mais le gagnant de cette affaire ne sera peut-être pas celui que l’on croit.

Les vrais gagnants : Trump et les républicains?

Les démocrates sont en train d’accomplir la même erreur qu’avec leurs attaques contre le juge Kavanaugh, lors de l’examen de sa candidature à la Cour suprême, et lors des élections de mi-mandat au Sénat en 2018. Attaquer un adversaire par des manœuvres qui n’ont aucune chance d’aboutir risque d’affaiblir les démocrates pour les élections à venir.

La tendance générale montre que les démocrates ont du mal à convaincre l’opinion publique américaine du bien-fondé de la destitution du président Trump. Si la majorité de la population continue à désapprouver sa façon de se comporter, seule une minorité souhaite sa destitution. En fait, l’obsession sur cette destitution lasse de plus en plus la population américaine, qui souhaiterait que le Congrès s’occupe de choses plus urgentes.

Ironiquement, c’est la primaire démocrate qui risque de faire les frais de la procédure d’impeachment. Comme le révèle un article du Washington Post, des sénateurs républicains veulent faire durer la procédure afin d’obliger les six sénateurs démocrates candidats à l’investiture présidentielle à rester à Washington au lieu de faire campagne.

Le comble est que dans le cas très peu probable où la procédure de destitution réussirait, le grand gagnant ne serait pas les démocrates, mais le vice-président Mike Pence. C’est lui qui, selon le XXVe amendement, deviendrait président des États-Unis advenant la déchéance de Donald Trump. On peut se demander si les démocrates assumeraient cette conséquence, compte tenu du caractère plus conservateur de Mike Pence par rapport à Donald Trump.

Le président Trump a prouvé depuis la campagne de 2016 qu’il était particulièrement à l’aise avec les attaques contre lui, se nourrissant de celles-ci pour accroître sa popularité. Finalement, les démocrates ne sont-ils pas involontairement en train de lui rendre service ?

Michel Kelly-Gagnon est président et directeur général de l’IEDM, Alexandre Massaux est chercheur associé à l’IEDM. Ils signent ce texte à titre personnel.

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