La CSN prône « l’austérité »… Surprenant mais vrai !
On apprenait mardi le 11 avril que, suite aux votes d’allégeance dans le domaine de la santé, la CSN avait perdu environ 20 000 membres. Rapidement, le président de la centrale, Jacques Létourneau, annonçait que cette diminution du nombre des cotisants allait conduire à une baisse de revenus de 10 millions $ par année. Il n’en fallait pas plus pour qu’il annonce que de douloureuses coupes dans les dépenses allaient suivre.
Écoutons-le : «On va surtout essayer de minimiser au maximum l'impact sur les services. Mais il n'y aura pas de vache sacrée ».
Ça vous rappelle quelque chose?
Le président de la CSN poursuit : « On va tout regarder: comment on organise le travail, comment on mène nos campagnes politiques. Mais il faut comprendre que c'est sûr, c'est comme dans n'importe quelle entreprise: le gros des dépenses, c'est dans la masse salariale».
Face à cet important déficit, le président de la CSN décide donc de sabrer les dépenses et de procéder à des mises à pied. Wow ! On croit rêver ! Le patron de la CSN se prononce POUR « l’austérité ».
Le discours syndical face aux déficits de l’État est habituellement monolithique : pas de coupes dans les dépenses, pas besoin d’éliminer les déficits. Au besoin, augmentons les impôts. Mais dans le cas de la business de M. Létourneau, la situation est tout autre.
Pourtant, d’autres avenues peuvent être envisagées. On pourrait augmenter les cotisations syndicales des membres de la CSN. Après tout, il faut préserver les services ainsi que les emplois, non? Mais on devine qu’une telle solution ne serait pas appréciée des cotisants. Peut-être a-t-on finalement réalisé en haut lieu qu’il y a des limites à « taxer » les gens?
On pourrait aussi penser que les employés actuels, dans un beau geste de solidarité, pourraient accepter une réduction de salaire. Après tout, Francis Vailles révélait récemment que la rémunération moyenne des employés de cette centrale dépasse les 147 000 $ par année, et que beaucoup d’entre eux bénéficient d’une pleine retraite à partir de l’âge de 50 ou 55 ans. Cette solution « solidaire » ne semble pas avoir été retenue. Difficile de limiter les avantages de ses employés. Parlez-en à Martin Coiteux!
Une autre solution possible : laisser courir les déficits et refiler la facture du service de la dette croissante aux générations futures des cotisants. Après tout, la dette, ce n’est pas grave ! N’est-ce pas ce que nous répètent constamment les porte-parole syndicaux?
Finalement, M. Létourneau semble avoir retenu la solution « néolibérale » : réduire les dépenses, quitte à réduire la main-d’œuvre employée. Ce choix responsable n’augmentera pas le fardeau des membres (LA raison d’être du syndicat) et ne pénalisera pas les générations futures.
Je me réjouis de voir que le président de la CSN semble avoir compris qu’il faut vivre selon ses moyens. Que la rigueur budgétaire (réduire ses dépenses lorsque ses revenus sont insuffisants) n’est pas le mal incarné. Maintenant, on aimerait qu’il comprenne que ce principe s’applique aussi à l’État et qu’il s’en souvienne lors des prochaines négociations du secteur public.
Germain Belzile est chercheur associé senior, département des actualités, à l'IEDM. Il signe ce texte à titre personnel.
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