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Textes d'opinion

1800 programmes de subventions, ce n’est pas assez ?

Je suis récemment tombé sur un tweet du gouvernement québécois, plus précisément de Financements Québec, un portail de prêts et de subventions gouvernementales. Le tweet se lit ainsi :

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Financements Qc (@FinancementsQC)

16-10-21 10:55

Plus de 440 programmes de #subventions et prêts gouvernementaux sont disponibles pour les entrepreneurs au Québec. cards.twitter.com/cards/18ce54eu…

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Comme vous le voyez, le gouvernement offre 440 programmes de financements pour les entreprises. Oui, oui, 440… Je me disais : mon Dieu, c’est énorme ! Mais attention, ce nombre est en réalité beaucoup plus élevé. L’Annuaire 2014 des subventions du Québec se « vante » plutôt d’offrir 1800 programmes d’aide et de subventions rendus disponibles par les différents paliers de gouvernement et divers organismes. Vous avez bien lu : 1800 !

Et comme si ce n’était pas assez, Québec a annoncé cette semaine l'allocation de plus de 500 millions de dollars pour « appuyer les PME dans leurs démarches d'exportation ». Difficile de savoir exactement combien de programmes existent, ou combien d’argent des contribuables est dépensé, puisque avec un État qui souffre de « subventionnite aigüe », l’aide aux entreprises est devenue une galaxie où s’entremêle une foule d’acteurs. L’octroi de subventions est devenu une industrie en elle-même… Je me demande si un jour, on n’offrira pas des programmes de subventions pour aider les programmes de subventions !

Si on pense que c’est important de subventionner et aider les entreprises, pourquoi 1800 programmes ? Est-ce que 15, 20 ou 25 programmes, voire 50, ne seraient pas suffisants ? De l’avis même du Vérificateur général, plusieurs programmes se dédoublent. Il y a du gaspillage et les gestionnaires sont incapables de mesurer la rentabilité des subventions.

D’ailleurs, rappelez-vous que l’État paye déjà beaucoup, de façon directe ou indirecte, pour le financement des PME. Investissement Québec, les fonds FIER, la Caisse de dépôt, le Fondaction CSN, et surtout, le Fonds de solidarité de la FTQ avec quelque 10 milliards de dollars d’actif. Et il en faudrait encore plus ?

Si avoir autant de programmes d’aide et de subventions était une recette gagnante, le Québec serait champion en Amérique pour le développement et la croissance économique, et tous voudraient nous imiter. Mais je regarde ce qui se fait ailleurs et ce n’est pas du tout le cas. La raison est simple : les subventions ne sont pas un moyen efficace pour développer l’économie et l’entrepreneuriat.

Non seulement de tels programmes sont-ils pour la plupart inefficaces, ils constituent du gaspillage. Pour les contribuables d’abord, puisqu’il faut payer les coûts d’administration de tous ces organismes et ces programmes de subventions. Pensons seulement à Investissement Québec, avec ses centaines d’employés syndiqués, leurs généreuses pensions, les bonis… malgré des rendements la plupart du temps médiocres.

Mais il y a un autre type de gaspillage associé aux subventions : le temps et l’énergie que les entrepreneurs mettent à aller chercher ces subventions plutôt que de développer de nouveaux marchés et de nouveaux produits. Plus l’État accorde des subventions et impose des réglementations, plus la réussite d’une entreprise dépend de l’aide gouvernementale. De là la multiplication des lobbyistes.

De façon générale, les subventions ne créent pas d’emplois. Elles ne font que déplacer des emplois qui auraient été créés de toute manière, mais ça se fait avec l’argent de vos impôts. Au fond, on force les contribuables à prendre des risques, à investir dans des entreprises via leurs impôts, sans leurs consentements. Par exemple, mes impôts, comme les vôtres, servent à subventionner Bombardier. Si j’avais voulu investir dans Bombardier, j’aurais acheté des actions. Mais là je n’ai pas le choix, mes impôts subventionnent une entreprise qui n’en vaut pas le risque selon moi.

Si le gouvernement cherche vraiment à développer l’économie et l’entrepreneuriat, il faut augmenter le niveau de liberté économique. Les deux sont indissociables. La liberté économique – moins d’impôts, moins de réglementation, moins d’ingérence politique – est une condition nécessaire pour un entrepreneuriat florissant et en santé.

Or, devinez quoi ? Le Québec se classe bon dernier au Canada, autant sur le plan de l’entrepreneuriat que le plan de la liberté économique ! Les données ont été colligées par mon collègue Mathieu Bédard, qui publiera sous peu un Cahier de recherche sur cette question.

Une solution pour remédier à ce problème serait d’éliminer une grande partie de ces programmes de subventions et utiliser les économies réalisées pour diminuer le fardeau fiscal de TOUTES les entreprises. De cette façon, on éliminerait les faveurs politiques et les entreprises pourraient se concentrer sur ce qu’elles doivent faire : innover et créer de la richesse.

Au contraire de ce que semblent croire nos dirigeants, l’ingérence économique brime l’entrepreneuriat. Qu’attendons-nous pour essayer une recette différente ?

Jasmin Guénette est vice-président de l'Institut économique de Montréal. Il signe ce texte à titre personnel.

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