Les Québécois doivent-ils se sevrer de leur dépendance au pétrole?
Au moment où j’écris ces lignes, 12 531 politiciens, bureaucrates et activistes se rencontrent à Lima dans le cadre de la conférence sur les changements climatiques.
Comme c’est le cas depuis la première conférence sur le climat en 1979, de beaux discours inspirants, des protocoles ambitieux et une multitude de mesures dites « vertes » seront présentés à la population sans que rien de concret ne soit accompli. Les partisans de la transition énergétique accélérée continuent d’attendre la venue d’un messie dans l’arène politique pour sauver l’humanité de sa « dépendance » au pétrole.
À ce sujet, mes collègues se sont penchés sur le plan proposé par Équiterre et Vivre en ville, qui vise à sevrer les Québécois de leur « dépendance » au pétrole. Comme il est démontré dans l’étude la transition énergétique n’est ni urgente ni rentable dans l’état actuel de la technologie. Non seulement les réserves de pétrole ont-elles constamment augmenté au cours des dernières décennies, mais les arguments concernant les retombées économiques, la réduction des importations de pétrole et les subventions aux emplois « verts » sont fondés sur une logique économique pour le moins douteuse.
Ces subventions impliquent le détournement de capitaux pour soutenir des emplois qui n’existeraient pas en leur absence. Le cas de l’Ontario est particulièrement révélateur alors que chaque emploi dans les énergies « vertes » coûte plus de 179 000 $ par année, et « détruit » par le fait même 3,2 emplois dans l’économie en général.
D’ailleurs, forcer la transition énergétique pourrait être contreproductif en dirigeant les investissements vers des technologies qui seront possiblement désuètes dans la prochaine décennie. L’évolution technologique est imprévisible et ce n’est pas le rôle de l’État de choisir les gagnants et les perdants.
La grande majorité des Québécois disent « non »
Advenant l’arrivé du tant attendu messie, les Québécois sont-ils prêts à payer pour leur cure de désintoxication? Non.
Ou du moins, très peu d’entre eux.
Un sondage réalisé par Léger pour le compte de l’IEDM démontre que près de 80 % des Québécois jugent importante la lutte contre les changements climatiques. Le problème, c’est lorsqu’on réalise que les mesures sont dispendieuses, alors que leurs effets sur les émissions de GES sont largement surestimés.
En évaluant les mesures proposées par Équiterre et Vivre en ville, il en coûterait 6,4 milliards de dollars annuellement pour réduire de 20 % la consommation totale de pétrole pour le Québec (en étant très optimiste). C’est l’équivalent d’une facture de près de 2000 dollars par ménage. À ce prix, le soutien populaire est à peine supérieur à 10 %…
Soyons clair, le but ici n’est pas de remettre en question l’importance de graduellement réduire notre consommation de pétrole, mais de chiffrer concrètement les mesures proposées, dans un débat qui en a bien besoin. Cette transition se fera par elle-même avec le développement graduel de moyens de rechange réalistes et abordables.
Michel Kelly-Gagnon est président et directeur général de l’Institut économique de Montréal. Il signe ce texte à titre personnel.