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Textes d'opinion

Ce que femme veut…

L’élection de Pauline Marois remet à l’avant-plan la question de la sous-représentation des femmes dans les instances politiques. Pour plusieurs, cette situation est inacceptable. Comme les femmes constituent la moitié de la population, elles devraient occuper la moitié des sièges à l’Assemblée nationale, dit-on. Offrir aux femmes l’«égalité des chances» en reconnaissant leur droit de participer à la vie démocratique est devenu insuffisant. Il faut maintenant l’«égalité des résultats», quitte à l’obtenir par la contrainte avec des quotas.

Le problème avec le rééquilibrage sexué du monde politique, c’est qu’il repose sur deux erreurs.

La première erreur consiste à supposer que la proportionnalité est la norme alors que c’est loin d’être le cas. En réalité, les groupes qui forment la société sont rarement représentés en fonction de leur poids démographique.

Par exemple, 77% des premiers ministres qui ont dirigé le Québec depuis la Confédération étaient membres du barreau. Aux États-Unis, à peine 14% des présidents avaient les yeux bruns et 26% avaient une taille inférieure à la moyenne. Certes, la couleur de yeux et la taille sont le produit du hasard de la naissance, mais le sexe ne l’est-il pas tout autant? Dans les sports, 1% des joueurs de la NBA sont d’origine asiatique et 4% des joueurs de la LNH sont noirs, tandis que 25% des joueurs de baseball sont gauchers. Pourquoi ne dénonce-t-on pas l’absence de proportionnalité dans ces cas-ci?

Sur le marché du travail, certains emplois sont essentiellement occupés par des femmes (enseignement, soins de santé, etc.), alors que d’autres sont à prédominance masculine (mécanique automobile, industrie forestière, etc.). S’il faut des quotas de femmes en politique, n’en faut-il pas également partout où les hommes sont majoritaires? Si oui, ne faut-il pas aussi imposer des quotas d’hommes là où les femmes sont majoritaires? Après tout, la parité ne peut être un concept à géométrie variable!

La seconde erreur consiste à présumer que seule la discrimination explique la faible présence des femmes en politique. Pourtant, les raisons de fuir les cercles du pouvoir sont nombreuses. La politique, c’est plus qu’un emploi exigeant, c’est un mode de vie qui commande, entre autres, le sacrifice de la vie privée et des petits bonheurs familiaux. Est-il donc impossible d’envisager que les ambitions des femmes se situent ailleurs qu’en politique?

Les féministes d’autrefois refusaient que les hommes leur imposent leur vision patriarcale du monde. Elles ont gagné leur lutte et nous ont légué un merveilleux héritage : la liberté de choisir entre poursuivre une carrière ou non, ainsi que le genre de carrière qui nous convient. En revanche, les féministes d’aujourd’hui ne valent pas tellement mieux que les hommes d’hier. Elles veulent à leur tour imposer leur vision du monde, une vision dans laquelle la parité politique serait une norme imposée, où les qualifications passeraient après le sexe, et où l’égalité des chances et les ambitions personnelles seraient secondaires.

La femme s’est affranchie de l’autorité de l’homme, mais son effort d’émancipation n’est pas terminé. Elle doit maintenant combattre la dictature des bien-pensants(es) qui se croient en droit de leur imposer leur conception de la société idéale. La route sera longue!

Nathalie Elgrably-Lévy est économiste senior à l'Institut économique de Montréal. Elle signe ce texte à titre personnel.
* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.

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