Un livre de l’Institut économique de Montréal lance le débat sur la libéralisation des marchés de l’électricité au Québec
Montréal, 30 mai 2001 – Les marchés de l’électricité sont en complet bouleversement en Amérique du Nord et malgré une stabilité apparente au Québec, les Québécois n’auront pas le choix de suivre de près ces développements et de remettre partiellement en question une structure de production en place depuis déjà quatre décennies.
Voilà ce dont traite La libéralisation des marchés de l’électricité un ouvrage lancé aujourd’hui par l’Institut économique de Montréal qui regroupe les contributions de deux économistes, Henri Lepage et Michel Boucher.
À l’heure où les interruptions de courant en Californie font les manchettes et semblent mettre un frein au mouvement de déréglementation dans plusieurs États américains ainsi qu’en Ontario et en Alberta, l’IEDM croit que le Québec ne peut plus faire l’économie d’un débat sur la question. Plus que jamais, il s’avère nécessaire de comprendre les multiples facettes de ce mouvement et de voir comment nous en sommes affectés, comment nous pouvons en tirer parti et comment nous pourrons éviter les déboires qui caractérisent certaines réformes mal planifiées.
Des changements irréversibles?
Dans la première partie de l’ouvrage, l’économiste français Henri Lepage démontre de quelle façon l’industrie de l’électricité s’est transformée aux États-Unis depuis la Première Guerre mondiale et compare diverses expériences de déréglementation au Canada, en Europe et en Australie.
Le bilan de ce survol est clair: le modèle classique du monopole régulé n’est plus viable. L’arrivée de nouveaux joueurs, les changements technologiques, la recherche d’une plus grande intégration régionale et d’une efficacité accrue, ont enclenché un mouvement irréversible vers un marché de l’électricité plus ouvert et compétitif.
M. Lepage explique par ailleurs que le cas très médiatisé de la Californie, loin d’être un exemple des effets néfastes de la libéralisation des marchés, trahit plutôt «l’échec d’une déréglementation mal conçue et mal conduite». D’autres expériences, en Pennsylvanie par exemple, se sont soldées par des réussites.
La situation au Québec
Où en est le Québec par rapport au reste de l’Amérique du Nord et du monde? Quelle est la performance d’Hydro-Québec, qui jouit d’un monopole presque exclusif sur tout le territoire québécois? Michel Boucher, professeur de science économique à l’École nationale d’administration publique, répond à ces questions dans la seconde partie du livre.
M. Boucher fait une évaluation sévère des choix stratégiques qui caractérisent la gestion de la société d’État depuis les années soixante. Selon l’économiste, la performance d’Hydro-Québec n’aurait pas été à la hauteur de ce qui a été promis lors de la nationalisation en 1962 même si, compte tenu des contraintes politiques qui lui sont imposées, l’entreprise s’avère relativement efficace.
L’auteur qualifie la privatisation de la société d’État de «solution idéale» mais est bien conscient qu’il n’existe présentement pas de mouvement d’opinion pour prendre cette direction. C’est pourquoi il propose d’autres mécanismes à court terme pour améliorer la performance d’Hydro-Québec: impartition, sous-traitance, octroi de contrats de service. Il rappelle que «la route de la libéralisation n’est pas une voie à sens unique» et que si le Québec veut profiter de l’ouverture des marchés ailleurs sur le continent, il devra lui aussi s’ajuster au changement. Hydro-Québec a d’ailleurs dû ouvrir son marché de gros d’électricité en 1997 en contrepartie d’un meilleur accès au marché américain.
La position de l’IEDM En publiant ce volume qui va à contre-courant des idées reçues, l’IEDM ne vise pas à faire la promotion de la privatisation d’Hydro-Québec, mais plutôt à susciter un débat qui tarde à se faire au Québec à cause du statut de «vache sacrée» dont jouissent plusieurs institutions issues de la «Révolution tranquille».
Comme l’explique le directeur exécutif de l’IEDM, M. Michel Kelly-Gagnon, «Notre but est de brasser la cage et de forcer le public et les décideurs québécois à sortir d’une torpeur parfois un peu complaisante et à confronter leur évaluation avec ce qui se fait ailleurs. Nous croyons d’ailleurs que les dirigeants actuels d’Hydro-Québec sont ouverts aux nouvelles solutions et nous sommes confiants qu’il jugeront cette contribution à son mérite.»
L’IEDM entend d’ailleurs continuer à alimenter cette discussion et laissera d’autres points de vue s’exprimer dans les mois qui viennent. Ce volume se veut donc une première contribution originale à ce débat inévitable et d’importance stratégique pour l’avenir économique du Québec.
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Pour toute information supplémentaire, veuillez contacter Michel Kelly-Gagnon, directeur exécutif de l’IEDM, au (514) 273-0969.