Joyeux Noël … sans culpabilité!
Comme chaque année, à l’approche de Noël, les trouble-fête se mettent à l’oeuvre. Ils s’emparent des journaux, des stations de radio et de télé pour répéter inlassablement que «Noël est trop commercial», que l’on accorde plus de valeur au matériel qu’au spirituel, et que le véritable esprit de Noël n’existe plus.
Ils critiquent et sermonnent ceux qui choisissent d’empiler les cadeaux au pied du sapin, et insistent sur la nécessité de célébrer Noël plus modestement. Vu leur discours, comment ne pas se laisser envahir par un terrible sentiment de culpabilité?
Je n’ai jamais caché être en faveur de la liberté économique, mais d’abord et avant tout je crois fermement en la liberté individuelle. Ainsi, je respecte totalement le fait que certains choisissent de fêter Noël de manière frugale, que ce soit par conviction ou par avarice. Mais ils devraient comprendre que leurs choix ne leur concèdent aucune supériorité morale, et qu’ils ne peuvent dicter au reste de la population comment fêter.
Des fonctionnaires paternalistes nous sermonnent déjà sur nos habitudes alimentaires, sur notre manque d’activité physique, sur l’importance de recourir au transport en commun, sur les méfaits de la cigarette… Nous n’avons donc pas besoin d’une «brigade anti-shopping» pour faire la promotion de la culpabilité et pour nous dire comment célébrer.
Les travailleurs ont trimé toute l’année, et certains ont vu jusqu’à 50% de leurs revenus confisqués par le fisc, en plus de payer la TPS, la TVQ, les taxes d’accise, les droits de douane, les impôts fonciers, les licences, les permis et autres taxes. Peut-on au moins leur accorder la liberté de dépenser l’argent qu’il leur reste comme bon leur semble, et sans leur donner mauvaise conscience?
Parallèlement au retour annuel de la «brigade anti-shopping», Noël est la période des guignolées et des collectes de fonds. C’est normal, on ne peut rester insensible au fait que 30% de la population montréalaise vit sous le seuil de faible revenu. Que la charité privée tente d’améliorer le sort des démunis est noble et chacun devrait faire sa part.
Taux de pauvreté élevé
Toutefois, une question est inévitable: pourquoi notre taux de pauvreté est-il le plus élevé des grandes villes canadiennes, alors que l’État québécois prétend combattre la pauvreté, que notre salaire minimum est plus élevé que partout ailleurs (une fois ajusté pour tenir compte du niveau de vie) et que nous avons le plus haut taux de syndicalisation en Amérique du Nord? Le Québec a même voté une Loi visant à lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale, comme si on pouvait régler les problèmes sociaux à coup de législations!
Comme la pauvreté persiste et que la charité privée est indispensable pour que certains puissent manger le soir du Réveillon, il devient évident que l’État a failli à sa tâche. Ne faudrait-il pas alors revoir notre manière d’aider les démunis?
Des organismes comme Centraide et l’Accueil Bonneau, des produits de l’initiative privée, réalisent des miracles avec peu de moyens, tandis que des fonctionnaires dilapident des sommes énormes dans des programmes qui avantagent souvent les riches. Comment faire confiance aux bureaucrates lorsqu’on sait que 184 millions de l’argent de nos impôts ont servi à financer les extravagances des dirigeants de Blue Bonnets? Avec cette somme, nous aurions pu envoyer un chèque d’environ 1500$ à 125 000 familles pauvres!
Pendant que des fonctionnaires gaspillent sans scrupules l’argent des contribuables, la «brigade anti-shopping» préfère culpabiliser les gens pour les cadeaux qu’ils s’offrent à Noël. Elle serait cependant bien plus utile si elle se recyclait en «milice anti-gaspillage étatique»!
Joyeux Noël à tous!
* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.
Nathalie Elgrably est économiste à l’Institut économique de Montréal et auteure du livre La face cachée des politiques publiques.