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Textes d'opinion

Pour un régime fiscal plus équitable et efficace

Il existe un mythe selon lequel notre système d’impôt sur le revenu des particuliers à taux marginaux progressifs respecterait les valeurs d’équité, de justice et de solidarité sociale. Au Québec, en tenant compte uniquement de l’impôt provincial, les taux sont de 16%, 20% et 24% selon le niveau de revenu.

Près de la moitié des Québécois (46%, selon un sondage Léger Marketing dévoilé le 11 novembre) seraient pourtant en faveur de l’adoption d’un taux unique d’imposition sur le revenu des particuliers. Une telle réforme fiscale, brièvement défendue par l’ADQ avant les dernières élections, aurait en effet plusieurs mérites.

Selon les adeptes des taux progressifs, un individu avec un revenu élevé devrait céder une part plus importante de celui-ci à l’État de façon à «égaliser les sacrifices» entre les contribuables. Il n’existe cependant aucune mesure objective qui permettrait de quantifier la valeur que chaque individu accorde à une somme d’argent supplémentaire. Cette «utilité», pour employer un jargon économique, est un phénomène subjectif propre à chacun et il est impossible de la comparer.

Cette impossibilité explique la grande diversité des systèmes à taux progressifs. Par exemple, le gouvernement du Québec imposait en 1978 une structure de 21 taux pour atteindre la prétendue égalité des sacrifices, alors qu’en 1986, sept taux étaient jugés suffisants à cet effet. En 1998, seulement trois taux d’imposition permettaient apparemment de réaliser cette même égalité. Ces changements du régime fiscal québécois furent jugés à chaque fois socialement justes et équitables. Il est par conséquent évident que la progressivité des taux relève de l’arbitraire et non d’une quelconque mesure objective d’égalité des sacrifices.

À travail égal, rémunération inégale

Le système d’imposition à taux progressifs entraîne en réalité plusieurs effets pervers. Il conduit à un revenu net par heure travaillée moins élevé si l’on décide de travailler plus. Les travailleurs ne sont donc pas incités à fournir davantage d’effort productif et à créer davantage de richesses. Un tel système fiscal décourage les individus, y compris les moins bien nantis, d’accéder à des revenus supérieurs en faisant en sorte qu’ils portent un fardeau fiscal de plus en plus lourd à mesure qu’ils travaillent plus et gravissent les échelons de la réussite professionnelle.

La relation entre pression fiscale, prospérité et recettes fiscales a été l’objet de nombreuses études économiques. Presque toutes concluent que plus le fardeau fiscal des citoyens s’alourdit, plus la création de richesse et la croissance économique ralentissent, et plus on constate une généralisation du travail au noir et de l’évasion fiscale.

Les économistes John Mullen et Martin Williams ont analysé la variation de la croissance économique des États américains sur deux décennies, en portant une attention particulière à l’impact des taux marginaux d’imposition. Ils ont trouvé que les États ayant de hauts taux marginaux d’imposition (forte progressivité) ont des taux de croissance économique moins élevés. Les résultats de cette analyse ont été confirmés par la Federal Reserve Bank d’Atlanta dont l’étude – portant sur une période de 30 ans et sur plusieurs États américains – a aussi observé une relation négative significative entre la pression fiscale et la croissance économique.

Une étude américaine du National Bureau of Economic Research a examiné l’effet de l’impôt sur le revenu des entrepreneurs individuels et son impact sur leurs décisions d’investissement et conclut que les taux d’imposition progressifs et élevés sur le revenu découragent les entrepreneurs de dépenser davantage en capital.

Un système d’impôt sur le revenu à taux unique respecte le principe d’égalité des citoyens devant la loi: un même taux pour tous. La solidarité sociale peut très bien être financée grâce à un système d’imposition à taux unique dans lequel, il ne faut pas l’oublier, les individus à revenus élevés continuent de payer plus d’impôts en termes absolus.

Six États américains, Hong Kong et l’Alberta ont déjà un taux unique d’imposition sur le revenu. C’est toutefois des pays d’Europe centrale et orientale qu’est venue la plus récente vague de réformes fiscales allant dans ce sens. L’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la Russie, la Serbie, l’Ukraine et la Slovaquie ont tous instauré des impôts à taux unique depuis la chute du communisme. Le Québec devrait les imiter. L’impôt à taux unique est non seulement justifié du point de vue de l’équité, mais il ne pénalise pas, comme le fait le système à taux progressifs, l’effort productif et la création de richesse.

Maxime Bernier est chercheur associé à l’IEDM.

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