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Taxer (encore) les «riches»?

Si les électeurs canadiens ont faim, ils seront ravis de se faire encore une fois servir la bonne vieille soupe populaire du «taxons les riches» avec la nouvelle taxe sur le luxe du gouvernement de Justin Trudeau. Dans une énième croisade contre une tranche nantie de la population, ce sera, dès septembre, plusieurs bateaux, automobiles et avions valant un certain montant qui seront taxés davantage. Bien qu’il puisse paraître logique d’avancer que les gens voulant mettre la main sur une voiture de luxe sont en mesure de payer un peu plus, cette réflexion est beaucoup trop simpliste et fait fausse route.

Les «riches» sont déjà lourdement taxés et imposés

Présentement, au Québec, le fameux 1% des particuliers les plus riches paie plus de 17% du total de l’impôt payé par les Québécois et Québécoises. Et ça, c’est sans compter la part très importante de ces particuliers payée en taxes à la consommation. Assez différent de ce qu’on pourrait entendre à la taverne du coin, non?

Il est tout à fait légitime de débattre sur la juste part qui devrait être payée en impôts par les mieux nantis. Toutefois, à entendre certains politiciens, le Canada et le Québec seraient pratiquement des paradis fiscaux pour les plus riches. On oublie certainement que le Québec figure parmi les 20 juridictions les plus taxées au monde, et que les autres provinces au pays n’affichent point un bilan reluisant non plus!

Le gouvernement fédéral estime que sa nouvelle taxe de luxe générera plus de 600 millions de dollars dans les coffres publics sur cinq ans. Bien que cette somme puisse sembler énorme, rappelons-nous que le fédéral dépense plus de 145 millions de dollars par jour, et donc cette nouvelle somme sera dépensée en moins de 5 jours. Et que dire de ses effets coûteux sur l’économie?

Une mauvaise nouvelle pour le secteur aérospatial canadien

Je n’étonnerai personne en avançant que de rendre plus cher des biens canadiens incite les consommateurs à se tourner vers les alternatifs étrangers. C’est d’ailleurs ce qui risque d’arriver avec notre industrie de l’aérospatiale et ses aéronefs. L’Association des industries aérospatiales du Canada a envoyé un cri du cœur au gouvernement en expliquant, selon eux, que c’est un millier d’emplois et près d’un milliard de dollars en revenu qui seront perdus au Canada à cause de cette taxe. Et tout cela suite aux 28 000 emplois perdus dans ce secteur pendant la pandémie!

Pourquoi pénaliser des centaines de travailleurs canadiens pour générer l’équivalent de 5 jours de dépenses sur cinq ans? Plutôt que d’y aller avec une taxe populiste, le gouvernement aurait dû consulter l’industrie pour bien analyser les répercussions. Si les consommateurs décident de bouder les aéronefs canadiens, comment pouvons-nous être assurés que les coûts en revenus fiscaux perdus ne seront pas supérieurs à la somme estimée de 600 millions de dollars?

Trop souvent, en matière de politiques publiques, les décideurs s’acharnent à changer la grosseur des pointes de tarte, plutôt que de viser à augmenter la taille de la tarte. Fondamentalement, le «but du jeu» est de s’assurer que tous les Canadiens et Canadiennes aient les moyens de s’offrir un panier de base de biens et services — qu’il soit partiellement offert par l’État ou non — leur permettant d’être heureux. C’est la base même de la social-démocratie. En sachant cela, pourquoi s’acharner à taxer davantage les « riches » si nous pouvons offrir un bon filet social à tous et toutes en allant chercher les revenus d’une façon moins dommageable pour l’économie et les travailleurs?

Que ce soit en attirant de nouveaux investissements privés, en favorisant la recherche et le développement ou en réduisant certaines dépenses opérationnelles publiques, le gouvernement regorge de moyens plus efficaces pour générer des revenus ou des économies. Cependant, taper sur les méchants «riches» est trop souvent plus politiquement payant, mais malheureusement économiquement dommageable…

Miguel Ouellette is Director of Operations and Economist at the MEI. The views reflected in this opinion piece are his own.

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