Le ras-le-bol fiscal des Québécois
Le mécontentement des Québécois et Québécoises à l’égard de l’ampleur du fardeau fiscal qu’ils doivent porter a fait la manchette ces dernières semaines. On ne doit pas pour autant s’attendre à voir le bon peuple se masser dans les rues et manifester, à l’instar d’un groupe militant. Plutôt, la majorité silencieuse continue de signaler ses maintes déceptions de façon bien plus subtile.
Le contribuable québécois est après tout confronté à un scénario tout à fait surréel: il paie les taxes et les impôts les plus élevés en Amérique du Nord. En contrepartie de cette ponction hors norme, il reçoit la plupart du temps un accès à une liste d’attente qu’un accès aux services de l’État. On a qu’à penser aux temps d’attente interminables qui caractérisent les services dispensés dans notre système de santé géré par le gouvernement.
Il s’en trouve d’ailleurs que, chaque année, des milliers de Canadiens et Canadiennes meurent alors qu’ils étaient en attente d’une chirurgie ou d’un test diagnostique crucial. Combien de Québécois connaissent le même sort? On ne le saura jamais vraiment, puisque l’appareil gouvernemental ne comptabilise même pas ces données, exception faite pour la région de la Capitale-Nationale. Nos administrateurs de plus en plus nombreux du système de santé peuvent donc pousser un soupir de répit!
Vous pensiez que les taxes et les impôts que vous payez sans trop vous plaindre vaudraient à votre marmaille une place en garderie subventionnée? Bienvenue sur la liste d’attente! Pour ce qui est de l’école publique, vous n’y pensez même pas. Après tout, vos enfants méritent mieux.
C’est alors avec stupéfaction que le contribuable exsangue observe le gouvernement provincial spolier le fruit de son travail en dépensant à gauche et à droite, le tout sans trop compter. Des subventions aux entreprises par-ci, plus de dépenses dans des programmes dits sociaux par-là, jusqu’à ce que l’on se retrouve avec le portrait suivant: l’État qui taxe le plus en Amérique du Nord n’est même pas en mesure de couvrir l’ensemble de ses factures à même ses taxes et impôts. C’est ainsi que, cette année, le ministre des Finances a déposé un budget qui est déficitaire de 11 milliards de dollars de dollars, représentant le déficit le plus élevé de l’histoire du Québec.
Cela nous rappelle une expression populaire qui s’applique fort bien en la matière: qui trop embrasse mal étreint. À force de tenter de tout faire, l’État québécois en est venu à faire un peu de tout. Mais surtout, à tout faire très mal.
Le dogme de l’universalité de tous les programmes gouvernementaux engendre une situation perverse où l’on doit payer deux fois pour recevoir un service. On paie pour des écoles publiques, mais on envoie nos enfants au privé. On paie pour un système de santé géré par le gouvernement, mais on ira au privé pour recevoir des tests diagnostiques dans des délais qui ont du sens. On paie pour les garderies subventionnées, mais on sait que nos enfants n’y auront jamais accès de toute façon.
Il est pourtant facile de concevoir que l’on pourra venir en aide à nos concitoyens les plus vulnérables, et leur offrir des services meilleurs que ceux auxquels ils ont présentement accès, si on cesse de faire la promotion d’un système de «tout-à-l’État».
Nous devons absolument ouvrir des secteurs névralgiques comme ceux de la santé et de l’éducation, où le gouvernement échoue le plus lamentablement, à la saine concurrence du secteur privé et de l’innovation entrepreneuriale.
Avec cette ouverture doit également s’imposer une réflexion quant au nombre de fonctionnaires et autres employés de l’État qu’il est raisonnable d’employer. Alors que le ratio de fonctionnaire par contribuable ne fait qu’augmenter inexorablement, il est de plus en plus irréaliste de croire que nous pourrons payer à tous ces gens des salaires décents sans ruiner nos finances publiques et les contribuables du secteur privé.
Le modèle québécois a longtemps été source de fierté pour une grande partie de nos concitoyens et concitoyennes. Or, aujourd’hui, nous sommes confrontés à une ruine sans précédent. Le contribuable est pressé comme un citron, et il constate bien que l’État est tout simplement incapable de livrer l’ensemble des services dont il est responsable.
Pire encore, il faudrait être bien naïf pour croire que les choses iront en s’améliorant considérant l’implacable réalité de la démographie québécoise.
Il faudra du courage politique à nos élus afin de faire ce qui s’impose, et entamer un vaste chantier de réflexion sur le rôle de l’État et la place qu’il occupe dans nos vies. Nous n’avons plus le luxe d’éviter ce débat important.
Daniel Dufort is President and CEO of the MEI. The views reflected in this opinion piece are his own.