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Les Premières Nations et les ressources : de belles histoires

Il y a quelques jours, l’IEDM publiait un cahier de recherche sur les Premières Nations. Cette recherche permet de découvrir un côté méconnu du grand public : l’implication grandissante des Autochtones dans le développement des ressources naturelles.

Un tel type de recherche est plutôt inhabituel à l’Institut. En général, nos travaux portent sur une politique publique et comment l’améliorer. Dans ce cas précis, des entrevues avec des leaders autochtones ont servi de trame à l’étude et accompagné un survol de cas réels de partenariats entre des Premières Nations et des entreprises non autochtones.

Ce cahier ne visait pas à présenter le pour et le contre du développement des ressources naturelles, que celui-ci se fasse en collaboration avec les Premières Nations ou directement par celles-ci. Le « contre » occupe régulièrement l’actualité; notre étude montre plutôt l’impact qu’ont déjà eu de tels projets et comment ceux-ci ont le potentiel de modifier profondément les relations entre les Premières Nations, les entreprises et les non-Autochtones. Comment, surtout, ils permettent d’entrevoir un avenir meilleur pour les Autochtones canadiens.

L’impression que l’on retire de cette recherche est très éloignée de la vision pessimiste, voire misérabiliste, qui est souvent associée aux communautés des Premières Nations. On peut y voir des leaders autochtones attachés à leurs traditions, mais aussi tournés résolument vers l’avenir; des gens qui tiennent à préserver leur environnement, mais aussi à ne plus dépendre des largesses des gouvernements, qui veulent mettre un repas sur la table de leur famille et voir leurs enfants bénéficier de meilleures opportunités. Bref, il s’agit du côté optimiste d’une réalité, que l’on voit peu dans les médias.

Dans les entrevues que j’ai moi-même accordées au sujet de cette recherche, un élément ressort clairement : l’extrême étonnement des journalistes face à ce pan caché de la vie de plusieurs groupes autochtones, soit leur approbation et leur implication active dans le développement des ressources. Il est donc important de le dire clairement : les Autochtones canadiens ne sont pas opposés en bloc au développement des ressources sur leur territoire.

De nombreux succès

Les succès sont nombreux. La nation Tahltan de la Colombie-Britannique a créé en 1985 la Tahltan Nation Development Corporation, que son président a décrite comme « un cas de réussite remarquable » à l’occasion du 30eanniversaire de l’entreprise. Ce groupe est actif dans la production d’hydroélectricité et la forêt. Dans la même province, les revenus de la nation Lax Kw’alaams issus de l’exploitation forestière dépassent les 22 millions $ par année, soit plus du tiers de ses revenus totaux, excédant largement le montant des transferts du gouvernement fédéral. Notons que l’Association nationale de foresterie autochtone estime que de 1200 à 1400 entreprises autochtones sont actives dans l’industrie forestière à travers le pays.

Aquaculture Canada recense une cinquantaine de groupes autochtones actifs dans ce secteur, dont les Kitasoo/Xai’Xais de la Colombie-Britannique et les Waycobah de Cap-Breton, en Nouvelle-Écosse, qui possèdent leurs propres fermes d’élevage de truite ou de saumon.

Dans le Nord-du-Québec, les Cris de Wemindji sont impliqués dans le secteur minier. La mine de Goldcorp, inaugurée en 2015, emploie aujourd’hui 225 membres des Premières Nations, soit le quart de ses employés. Le secteur minier est l’un dans lequel les Premières Nations sont les plus actives, avec 455 ententes signées dans ce secteur entre 2000 et 2017, qui comportent fréquemment des clauses d’embauches prioritaires et de sous-traitance pour leurs membres. En 2016, les membres des Premières Nations travaillant dans le secteur des mines ont ainsi déclaré un revenu médian deux fois plus élevé que celui de l’ensemble des travailleurs de leurs communautés, et presque deux fois plus élevé que celui de l’ensemble des non-Autochtones.

La nation Fort McKay du nord de l’Alberta, qui compte un peu moins de 900 membres, a présenté des revenus de 60 millions $ au cours des dernières années, atteignant un sommet de 80 millions $ pour l’exercice financier 2017-2018. Le revenu moyen (après impôt) des résidents de Fort McKay était d’environ 73 000 $ en 2015. Rappelons que le revenu médian québécois n’est que de 41 000 $ par année. Et tandis que les membres des Premières Nations occupant un emploi gagnaient en moyenne 51 500 $ en 2016, avant impôts, le salaire moyen s’élevait à près de 150 000 $ pour ceux travaillant à l’extraction de pétrole et de gaz, et à plus de 200 000 $ pour ceux œuvrant sur un gazoduc. (Tous ces chiffres sont documentés dans le cahier.)

Les cas recensés très sommairement ici ne sont que quelques-uns des cas présentés dans le cahier de recherche. Et le cahier ne présente qu’une fraction des partenariats dans lesquels les Premières Nations travaillent au développement des ressources au Canada.

Malgré tous ces beaux succès, de nombreux obstacles subsistent. Les projets de loi C-49 et C-69, actuellement à l’étude à Ottawa, risquent de rendre plus difficile, voire impossible la mise en place de nouveaux projets dans le domaine du développement des ressources. Il faut applaudir les efforts des Premières Nations qui cherchent à améliorer leur situation. Encourageons-les et, surtout, ne créons pas d’obstacles supplémentaires à leur émancipation.

Germain Belzile is a Senior Associate Researcher at the MEI and the author of “The First Entrepreneurs – Natural Resource Development and First Nations.” The views reflected in this op-ed are his own.

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