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Textes d'opinion

Taxer les épargnants n’est pas la solution

À la suite de l’élection du gouvernement libéral, l’attention de plusieurs économistes et experts du secteur financier s’est tournée vers la promesse de l’équipe Trudeau de faire passer le taux d’imposition des banques et des compagnies d’assurance de 15 % à 18 %, tout en créant un « dividende de la relance » versé par ces mêmes entreprises pour une facture de 2,5 milliards de dollars par an, sur quatre ans. Bien que s’attaquer à ces géants du secteur financier puisse être politiquement rentable, il s’avère que ces mesures auront plutôt comme effet de pénaliser les épargnants et les familles québécoises.

Au bûcher, les résultats!

Gouverner sur la base de motifs électoralistes génère rarement les résultats économiques espérés, surtout lorsqu’il est question d’augmenter l’imposition d’un secteur clé de notre économie qui dicte en partie le revenu de retraite de millions de Canadiens. En effet, si l’image d’un banquier avec un scotch à la main et fumant un cigare cubain du haut de sa tour au centre-ville de Montréal peut séduire l’imagination populaire, il convient de se demander où sont dirigés les profits de ces institutions financières.

Au Québec, le rendement de plusieurs régimes publics de retraite dépend en partie de la croissance de la valeur des actions des banques et des compagnies d’assurance canadiennes. Par exemple, la Caisse de dépôt et placement du Québec, qui gère le Régime de rentes du Québec, détient année après année des montants substantiels d’actifs dans le secteur financier. Ainsi, lorsque le profit de ces institutions financières est artificiellement diminué par une hausse des impôts, ce sont tous les épargnants qui en souffrent. En d’autres mots, des millions de Québécois et de Québécoises sont indirectement actionnaires de nos banques et se partagent leurs profits. Nous sommes bien loin de notre banquier imaginaire typique, non?

De plus, bien que peu de banques à charte existent au Canada en raison de la réglementation actuelle, le secteur financier demeure très compétitif. Pensons notamment aux fréquentes promotions offertes par les institutions financières, ou les réductions permanentes de frais, comme il en est question actuellement avec l’élimination des commissions de courtage dans certaines banques. Il est clair que le secteur ne pourra pas demeurer aussi compétitif si de nouveaux obstacles fiscaux et réglementaires sont imposés. Ce sont donc les consommateurs qui finiront par écoper de la facture, en subissant potentiellement l’augmentation de certains frais.

Se regarder dans le miroir

Le gouvernement Trudeau justifie ces nouvelles propositions de taxes en invoquant notamment les dépenses accrues lors de la pandémie et le souhait d’augmenter les revenus de l’État fédéral. Toutefois, avant de penser à alourdir le fardeau fiscal de nos entreprises et de nos contribuables, les décideurs politiques devraient plutôt chercher des façons de contrôler les dépenses publiques. En à peine cinq ans, la dette fédérale a doublé, alors que le pays enregistrait des déficits même en période de croissance économique avant la pandémie. La solution doit venir du côté des dépenses, et non de celui des revenus.

Après tout, même si l’on additionne l’ensemble des nouvelles mesures d’accroissement des revenus présentées dans le budget fédéral, auxquelles s’ajoutent les recettes maximales qui pourraient être perçues grâce à l’impôt unique sur la fortune, il faudrait seulement un peu moins de seize jours au fédéral pour dépenser ces nouveaux revenus. Les mesures politiques populistes comme l’augmentation de l’imposition des banques et des compagnies d’assurance ne génèrent habituellement qu’un revenu très superficiel pour l’État, mais engendrent des coûts importants pour les consommateurs et les épargnants.

Nos gouvernements doivent définitivement cesser de céder aux pressions politiques et populaires, et se concentrer sur l’analyse économique de leurs politiques publiques et leurs conséquences sur les familles québécoises, tout en contrôlant les dépenses pour assurer une meilleure équité intergénérationnelle.

Miguel Ouellette est directeur des opérations et économiste à l’IEDM. Il signe ce texte à titre personnel.

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