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Surplus budgétaires : Québec doit redonner aux contribuables leur argent

Point expliquant que le gouvernement du Québec doit profiter de la forte croissance économique pour diminuer le taux d’imposition des particuliers

La robuste croissance économique du Québec ces dernières années a permis au gouvernement de dégager un surplus lors des cinq derniers budgets. Entre l’exercice financier 2014-2015 et celui de 2018-2019, Québec a en effet cumulé des surplus budgétaires totalisant 21,3 milliards $, ce qui plaide fortement pour une baisse de l’impôt sur le revenu des particuliers, montre cette publication de l’IEDM.

En lien avec cette publication

Quebec taxpayers deserve a break (National Post, 10 mars 2020)

 

Ce Point a été préparé par Daniel Dufort, directeur principal des relations externes, communications et développement de l’IEDM. La Collection Fiscalité de l’IEDM vise à mettre en lumière les politiques fiscales des gouvernements et à analyser leurs effets sur la croissance économique et le niveau de vie des citoyens.

Le Québec profite actuellement d’une des plus fortes croissances économiques au pays. En 2018, la Belle Province s’est classée deuxième au Canada avec une croissance de 2,4 % de son PIB, n’étant devancée que par l’Île-du-Prince-Édouard. À mi-chemin en 2019, la tendance semblait se maintenir alors que l’économie de la province avait crû de près de 3 % par rapport à la même date l’année précédente(1).

Grâce à cette croissance, le gouvernement a dégagé un surplus budgétaire chaque année depuis l’exercice financier 2014-2015. Québec devrait saisir cette opportunité pour stimuler la productivité dans la province en abaissant le taux d’imposition des particuliers.

Des surplus grâce aux revenus

Pendant les années financières 2014-2015 à 2018-2019, les surplus budgétaires cumulés du Québec ont atteint 21,3 milliards $. Le ministère des Finances prévoit que dix autres milliards s’ajouteront au cours des trois prochaines années (voir la Figure 1). Si le passé est garant de l’avenir, cette estimation pourrait s’avérer très en deçà de la réalité(2).

Le gouvernement a utilisé une grande partie des surplus des cinq dernières années, soit 10,5 milliards $, pour effectuer des versements au Fonds des générations, destiné au remboursement de la dette, une décision responsable pour la gestion des finances publiques à moyen et long terme. Le surplus net pendant la période a donc été de 10,8 milliards $(3). Le gouvernement ne planifiait pas recevoir ces sommes; il ne les avait pas budgétées et il ne les a pas utilisées pour couvrir ses dépenses ou pour fournir des services à la population.

Ces surplus n’ont pas non plus été engrangés en réduisant les services publics. Depuis que les finances du Québec sont passées au vert, en 2015, les dépenses de l’État ont augmenté chaque année. Au total, leur croissance a été de 12,1 % depuis cinq ans(4).

Même si on acceptait la prémisse que chacune des dépenses de l’État est indispensable et réalisée de façon optimale, et que leur hausse doit nécessairement suivre l’inflation et la croissance démographique (ce qui suppose aussi qu’aucun gain d’efficience ou économie d’échelle n’est possible), l’augmentation aurait dû être de 13,0 %(5). En comparaison, les revenus de l’État, eux, ont grimpé de près de 23 %(6). Les surplus sont donc presque entièrement dus à une augmentation plus grande et plus rapide des revenus, et non pas à une diminution des dépenses, même relative.

Que faire avec les surplus?

Avant de répondre à la question de ce qui doit arriver aux surplus budgétaires, on doit garder à l’esprit que l’argent des contribuables appartient d’abord à ceux-ci, et non à l’État. Les surplus ne sont ni plus ni moins que de l’argent prélevé en trop auprès des Québécois. De cette perspective, une baisse d’impôts peut relever autant d’une saine politique économique que d’un impératif moral.

Certes, le précédent gouvernement a procédé à quelques allégements du fardeau fiscal, telle la baisse de 16 à 15 % du premier taux d’imposition et l’abolition de la contribution santé, totalisant environ 1,7 milliard $(7). Le présent gouvernement, lui, a procédé à une harmonisation de la taxe scolaire, d’une valeur de 800 millions $(8).

En comparaison aux près de 120 milliards $ de revenus consolidés que le gouvernement prévoit engranger au cours de la prochaine année financière(9), ces réductions restent cependant minimes, et le contribuable québécois demeure particulièrement sollicité dans un contexte nord-américain. Le taux de pression fiscale s’élevait à 38,6 % du PIB au Québec en 2018, alors que la moyenne dans le reste du Canada était de 32,2 %(10). Un fardeau fiscal aussi élevé diminue le pouvoir d’achat des individus : sans surprise, à 28 455 $, le revenu disponible des Québécois était le plus bas au pays en 2017, alors qu’il était en milieu de peloton il y a 30 ans(11).

Affecter les surplus budgétaires à la réduction du fardeau fiscal des particuliers pourrait avoir un impact significatif sur leur situation financière. En 2018-2019, les surplus gouvernementaux se sont élevés à 8,3 milliards $, soit plus du quart de l’impôt prélevé sur le revenu des particuliers (31,8 milliards $). À titre d’exemple, le gouvernement aurait donc pu réduire l’impôt sur le revenu de chaque contribuable de 10 % en moyenne et générer néanmoins des surplus, même après le versement au Fonds des générations(12).

L’idée d’un rattrapage économique du Québec étant à l’ordre du jour, il est important de rappeler le rôle que la fiscalité peut jouer dans cette équation. Des études réalisées par l’OCDE, notamment, ont montré que les économies dans lesquelles les gouvernements interviennent et dépensent le plus sont généralement les moins dynamiques, c’est-à-dire celles qui enregistrent les taux de croissance les plus faibles(13).

Donner un répit

Le Québec traverse une période de croissance économique robuste et soutenue. Le gouvernement devrait profiter de l’occasion pour diminuer le taux d’imposition des particuliers. Le premier ministre avait d’ailleurs fait de la prospérité des Québécois un des enjeux de la dernière campagne électorale(14). Lors de la plus récente mise à jour économique, le gouvernement avait aussi noté que l’amélioration du niveau de vie des Québécois passait par des gains de productivité(15).

Laisser aux citoyens une part plus grande du fruit de leur travail est une excellente façon de stimuler la productivité et de rehausser leur niveau de vie. La situation budgétaire très favorable offre au gouvernement l’occasion de donner un répit aux Québécois, qui ont grandement contribué à l’accumulation des surplus actuels.

Références

  1. Robert Hogue, « Québec – Une nouvelle puissance économique? », RBC, juin 2019.
  2. Gérald Fillion, « Surplus de près de 8 milliards à Québec », Radio-Canada, 21 juin 2019.
  3. Finances Québec, Le budget en chiffres, Statistiques budgétaires du Québec, novembre 2019.
  4. Idem.
  5. Idem. Calculs de l’auteur. Banque du Canada, Feuille de calcul de l’inflation; Institut de la statistique du Québec, Estimation de la population du Québec, 1er juillet 1971 à 2019, à jour au 30 septembre 2019.
  6. Finances Québec, op. cit., note 3.
  7. Finances Québec, Le plan économique du Québec – Mise à jour de novembre 2017, 21 novembre 2017, p. A.47.
  8. Gouvernement du Québec, Vos priorités, votre budget – Plan budgétaire : budget 2019-2020, 21 mars 2019, p. B.11.
  9. Finances Québec, op. cit., note 3.
  10. Collectif, Bilan de la fiscalité au Québec – Édition 2020, Cahier de recherche 2020-01, Chaire de recherche en fiscalité et en finances publiques, 2019, p. 39, 44.
  11. Jonathan Deslauriers, Robert Gagné et Jonathan Paré, Productivité et prospérité au Québec – Bilan 2018, Centre sur la productivité et la prospérité – Fondation Walter J. Somers, HEC Montréal, p. 28.
  12. Finances Québec, op. cit., note 3.
  13. Jean-Marc Fournier et Åsa Johansson, The Effect of the Size and the Mix of Public Spending on Growth and Inequality, OECD Economic Department Working Papers No. 1344, OCDE, 15 décembre 2016.
  14. Marco Bélair-Cirino, « Legault se présente comme un futur ”premier ministre économique” », Le Devoir, 13 août 2018.
  15. Finances Québec, Le point sur la situation économique et financière du Québec – Automne 2019, gouvernement du Québec, 7 novembre 2019.
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