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Observations spontanées

Secteur aérien : Ce sont les barrières à l’entrée, et non la part de marché, qui importent

Le 11 février 2021, le gouvernement Trudeau a donné son aval à l’achat d’Air Transat par Air Canada. Alors que le nombre de passagers a chuté de 60 % dans le monde en 2020 et que les pertes de revenus ont été estimées à 391 milliards de dollars américains, la COVID-19 remet en question la survie de bon nombre de transporteurs aériens. Air Canada a fait valoir que l’acquisition proposée est susceptible d’offrir les meilleurs avantages tant pour les travailleurs que pour la qualité des services aux passagers et la santé financière du secteur. Cela dit, les consommateurs devraient-ils s’inquiéter d’éventuelles hausses de prix?

L’année dernière, le Bureau de la concurrence soutenait que l’acquisition entraînerait une diminution des options disponibles, ainsi qu’une augmentation des prix pour les passagers du fait de l’accroissement de la part de marché d’Air Canada. Or, tant la théorie économique que les données empiriques suggèrent que ce sont les barrières à l’entrée, plutôt que la taille et le nombre d’entreprises sur un marché, qui importent. Le Bureau de la concurrence a d’ailleurs également conclu que les barrières à l’entrée dans le secteur aérien au Canada sont généralement élevées. En effet, alors que le rapport sur la compétitivité du secteur du voyage et du tourisme de 2019 du Forum économique mondial plaçait le Canada au 9e rang du classement général, il occupait le 61e rang pour l’ouverture internationale et le 107e pour la compétitivité des prix, sur un total de 140 pays.

L’IEDM a publié une étude à ce sujet en 2019, laquelle expliquait que la part de marché d’une entreprise, même si elle est considérable, ne se traduit pas nécessairement par une diminution de la concurrence. Les entreprises qui dominent un marché sont susceptibles d’avoir acquis leur position en raison de leur efficacité, de l’amélioration de la qualité de leurs produits et de la réduction des prix. Dans un marché sans entraves à l’entrée, toute dégradation de la qualité ou augmentation excessive des prix encourage les concurrents actuels et potentiels à conquérir la part de marché détenue par l’entreprise dominante. Dans ce contexte, un niveau de concentration élevé peut donc avoir pour conséquence de faire bénéficier les consommateurs d’un accès à des biens moins chers et de meilleure qualité, en plus des avantages liés à l’innovation.

Or, lorsqu’il s’agit de la concurrence au sein du secteur aérien, la Loi sur les transports au Canada limite explicitement la concurrence étrangère et interdit tout transport de passagers entre les aéroports canadiens par des opérateurs étrangers. Concrètement, cela signifie qu’un transporteur non canadien ne peut embarquer des passagers à Winnipeg pour les déposer à Montréal, puis embarquer de nouveaux passagers à Montréal à destination d’Amsterdam. De telles barrières à la concurrence – issues de mesures gouvernementales, et non du marché ou de sa domination par un seul concurrent – ont généralement pour effet d’augmenter artificiellement le prix des billets d’avion.

Il est vrai que de telles barrières existent également dans bon nombre d’autres pays, ce qui restreint l’environnement concurrentiel des transporteurs aériens canadiens à l’étranger. Si nous souhaitons réellement améliorer le sort des consommateurs, nous devons veiller à l’élimination de ces barrières à l’entrée, tant au Canada qu’à l’étranger. Limiter artificiellement la part de marché d’Air Canada au pays ne ferait que nuire à la compétitivité du transporteur aérien face à des acteurs encore plus importants sur le marché international.

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