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Textes d'opinion

Réflexions sur la diversité des voix dans les médias

L’ex-journaliste et députée libérale Christine St-Pierre soulevait il y a quelque temps qu’« il faut éviter toute concentration de la presse [et] diversifier les voix ». Elle ajoutait qu’« être informé, c’est être libre, et cette liberté comprend la diversité de voix ». Madame St-Pierre a parfaitement raison d’affirmer qu’une démocratie en santé doit comporter, notamment, une « diversité de voix ». Par contre, elle et plusieurs chroniqueurs et commentateurs qui se sont prononcés jusqu’à maintenant sur la question manquent à mon avis complètement le bateau quant aux véritables causes du manque de diversité ou à sa potentielle dégradation.

En effet, trop de gens parmi ceux qui s’inquiètent focalisent exclusivement sur la question de la propriété des médias comme étant le principal déterminant de cette diversité. Or, après avoir lu La PresseLe Devoir et Le Journal de Montréal presque quotidiennement au cours des vingt dernières années, j’affirme avec force que c’est plutôt la pensée de groupe qui sévit au sein de la classe journalistique et chez certains commentateurs qui est la véritable menace à cette diversité. 

C’est ce que l’on appelle parfois « l’idéologie du Plateau », laquelle est grosso modo constituée de clichés gauchisants répétés ad nauseam sans rigueur ou curiosité intellectuelle. Loin d’être le fruit d’une fabulation, cette mentalité du Plateau–Mont-Royal existe d’abord en tant que réalité géographique. Le magazine Trente, de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec, en a d’ailleurs fait la preuve il y a quelques années par une étude des codes postaux de ses membres qui montrait une disproportion notable en faveur de ce quartier de Montréal (un journaliste sur sept y résidait, alors que Le Plateau-Mont-Royal ne compte que 1/80e de la population de la province!). Mais cette « pensée Plateau » est davantage un état d’esprit et la résultante d’un comportement de meute qu’une question purement géographique.

À l’inverse, je peux dire par expérience que les médias du Groupe Quebecor favorisent généralement le choc des idées et la diversité d’opinion plus que quiconque. Va-t-on y retrouver fréquemment des textes formulant des attaques enragées contre Pierre-Karl Péladeau? Non. Mais dans à peu près n’importe quelle organisation (de presse ou non), on évite de critiquer publiquement ses collègues ou patrons. Rien de bien scandaleux ici.

C’est quand même Le Journal de Montréal qui a eu l’ouverture d’esprit de publier dans ses pages un texte de ma part défendant et faisant l’éloge de Paul Desmarais père. C’est aussi Le Journal de Montréal qui publie régulièrement à la fois mon amie Nathalie Elgrably et l’ineffable Léo-Paul Lauzon.

Dans le contexte de la concurrence féroce aux médias traditionnels générée par Google, Facebook et compagnie, laquelle ne va pas aller en diminuant, on doit cesser de créer des barrières artificielles à la nécessaire consolidation de cette industrie. Oui, il faut probablement se préoccuper du manque de diversité des voix au Québec, mais c’est ailleurs qu’on doit regarder pour trouver des solutions à ce problème.

Michel Kelly-Gagnon est président et directeur général de l’IEDM. Il signe ce texte à titre personnel.

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