Camions-restaurants : un (petit) pas dans la bonne direction
Après avoir permis le retour de la cuisine de rue sur son territoire il y a deux ans, Montréal y va de mesures pour simplifier et rendre moins coûteuse la gestion de l’occupation des emplacements où les camions-restaurants sont autorisés à se garer.
Une réglementation plus simple et moins coûteuse ? Bonne nouvelle ! Nos entrepreneurs vont souffler un peu. Une étude récente avait classé Montréal au 74e rang parmi 100 villes du Québec pour la facilité du commerce. Disons que ce n’était pas difficile de faire mieux…
Par contre, il ne faudrait pas oublier que le secteur reste soumis à une lourde réglementation qui décourage l'entrepreneuriat local. Entre autres, les heureux élus qui ont le « droit » de travailler sont rares.
Ainsi, selon le portail « Cuisine de rue » de la Ville :
- Les arrondissements où un camion de cuisine de rue peut être présent sont : Côte-des-Neiges–Notre-Dame-de-Grâce, Le Sud-Ouest, Mercier–Hochelaga-Maisonneuve, Rosemont–La Petite-Patrie, Verdun et Ville-Marie (…) les camions de cuisine de rue, détenteurs d’un permis, pourront occuper l’un des 25 emplacements, répartis sur les 20 sites identifiés.
- L'appel de candidatures pour la saison 2017-2018 est terminé, et le comité de sélection a retenu 19 exploitants. Avec les 7 sélectionnés en 2016, il y a donc 26 exploitants qui sont autorisés à effectuer une demande de permis cette saison.
Donc, si un entrepreneur habite ou travaille dans le Sud-Ouest ou dans Ville-Marie, il a le « droit » de se lancer en affaires. Mais pas ceux de Villeray, d’Anjou ou Outremont par exemple. Pourquoi ne pas ouvrir plus de sites aux camions ?
Aussi, pour obtenir un permis, on doit soumettre une demande et un plan d'affaires à un comité de cinq personnes mandatées par la ville. Ce comité de sages, dont trois sont liés à l'industrie de la restauration, va évaluer la viabilité de votre projet. Ce sont donc eux qui décident qui peut opérer un camion-restaurant, qui ne le peut pas, et quelle bouffe sera offerte. Le Politburo doit-il aussi donner son aval ?
Les rares sites comportent également leur lot de restrictions. Chacun des sites peut être occupé par un maximum de trois exploitants en même temps, qui n'ont pas le droit de faire commerce ailleurs que dans les sites désignés.
Dernière chose et non la moindre : pour obtenir un permis, il faut que vous soyez déjà propriétaire d'un restaurant qui a pignon sur rue. Comme frein à l’entrepreneuriat, difficile d’imaginer mieux ! Pourquoi ne pas ouvrir le marché à tous ceux qui veulent se lancer en affaires, et non pas seulement aux restaurants et traiteurs ayant une cuisine « non mobile » ? Est-ce parce que les restaurateurs actuels craignent la concurrence des camions ?
Pour toutes ces raisons, il n’y a toujours qu’un peu plus de deux camions-restaurants par tranche de 100 000 habitants à Montréal, alors qu’il y en a plus de trente à Orlando ou Miami, et plus de vingt à Washington et Minneapolis où, aux dernières nouvelles, il y avait toujours un hiver avec de la neige, comme ici.
Qu’on se le dise : les changements apportés par la Ville semblent aller dans la bonne voie. Mais les élus montréalais ont encore fort à faire pour encourager les entrepreneurs à se lancer dans cette industrie.
Jasmin Guénette est vice-président de l'Institut économique de Montréal. Il signe ce texte à titre personnel.
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