À quand la (vraie) fin du monde?
Le 22 avril dernier, on a célébré le Jour de la Terre un peu partout dans le monde, notamment à New York avec une séance protocolaire de signatures à L'ONU suivant les accords de Paris de l'an dernier sur les changements climatiques.
On a alors pu lire et entendre les opinions de nos nombreux groupes écologistes, qui nous ont dit encore une fois que les humains menacent la nature et que plus les années passent, plus nous nous dirigeons vers un mur. Si rien ne change, c'est la fatalité qui nous attend.
Ce n'est pas la première fois qu'on entend ce genre de discours. Comme l'écrivait mon ancien collègue Pierre Desrochers sur le site de l'IEDM, le théologien Tertullien, dans son traité De l'âme publié il y a plus de 1800 ans – une époque où la population mondiale était environ 30 fois moindre qu'aujourd'hui – constatait déjà avec horreur que les humains sont « un fardeau pour le monde; à peine si les éléments nous suffisent; les nécessités deviennent plus pressantes; cette plainte est dans toutes les bouches; la nature va nous manquer ». Heureusement, ajoute-t-il, « les pestes, les famines, les guerres, les gouffres qui ensevelissent les cités » agissent « comme un remède ».
Attendez, j'ai d'autres prédictions de fin du monde pour vous! Au début du vingtième siècle, le directeur du service forestier américain Gifford Pinchot prédisait une pénurie de bois au milieu des années 1930 et de charbon dans les années 1960. En 1972, un influent rapport rédigé à l'instigation du Club de Rome soutenait que la croissance économique et la protection de l'environnement étaient mutuellement exclusifs et que le monde serait notamment confronté à une pénurie d'or en 1981, de cuivre en 1987 et de pétrole en 1992.
Et il y en a beaucoup d'autres prédictions de la sorte. Lisez-en davantage sur le site de FEE (en anglais).
N'en déplaise à leurs détracteurs, le capitalisme et l'économie de marché en général ont fait plus que quiconque pour améliorer le sort des pauvres. Mais aussi, et c'est une facette moins connue, pour assurer la protection de l'environnement.
Avec notre richesse accrue, nous développons chaque jour des façons plus efficaces et plus propres de produire et de consommer, et nous nous préoccupons de plus en plus de l'environnement. D'ailleurs, les statistiques le montrent. Selon plusieurs indicateurs, la qualité de l'environnement s'est grandement améliorée depuis plus d'un siècle.
Comme l'a souvent souligné le professeur Pierre Desrochers, la production alimentaire a plus que doublé dans le monde depuis 1961, et triplé dans les pays en développement. Par personne, la quantité de nourriture a bondi de 26 % à l'échelle de la planète depuis 1970. Quant aux prix des denrées alimentaires, ils ont diminué de près des deux tiers depuis le milieu des années 1950.
La planète en bénéficie, car nous produisons plus en utilisant moins de ressources. En 1940, les agriculteurs américains produisaient 56 millions de tonnes métriques de maïs en utilisant 31 millions d'hectares. En 2000, ils en produisaient cinq fois plus (252 millions de tonnes métriques) tout en utilisant 6,5 % moins de surface cultivée.
Aussi, le développement du gaz naturel et de l'hydroélectricité a permis de réduire considérablement la demande pour le charbon et le bois de chauffage. Ceci a grandement amélioré la qualité de l'air dans les villes et fait en sorte que le couvert forestier a augmenté ou est resté stable dans la plupart des pays industrialisés ces dernières décennies.
Cela risque de vous étonner, mais ce sont les acteurs du marché qui sont les grands responsables des progrès réalisés au cours des dernières décennies sur le plan de la qualité de notre environnement. En effet, la recherche de profit et la concurrence entre entreprises forcent ces dernières à améliorer leur efficacité et à toujours innover. Les entreprises cherchent également à répondre à la demande des gens pour des produits moins dommageables et un environnement plus sain.
À titre d'exemple, on peut penser aux moteurs à essence. Ces derniers sont beaucoup plus performants et économiques qu'ils l'étaient dans le passé. Le développement des moteurs hybrides et électriques, entre autres, incite les fabricants à rendre leurs moteurs à essence moins gourmands et plus « propres ». Derrière tout ça, il y a la motivation du profit. Chaque fabricant cherche à gagner des parts de marché tout en répondant aux besoins des consommateurs.
Les progrès réalisés dans les technologies de transport et de conservation ont fait en sorte que l'on peut importer des aliments périssables produits dans des pays parfois très éloignés, et ce à meilleur coût que si on les produisait de façon locale. Moins de coûts de production et de stockage local contribuent en retour à réduire la consommation d'énergie et les émissions de CO2 qui y sont associées.
Grâce à un système que les écologistes aiment blâmer pour tous nos maux – l'économie de marché -, la Terre se porte mieux que l'on pense. De plus en plus de personnes semblent s'en rendre compte. C'est sans doute pour cela que le rassemblement pour le Jour de la Terre n'a attiré qu'une poignée de suspects. La plupart des gens ont voulu célébrer de la meilleure façon qu'il soit: en vaquant à leurs occupations quotidiennes avec les leurs.
Jasmin Guénette est vice-président de l'Institut économique de Montréal. Il signe ce texte à titre personnel.
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