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Textes d'opinion

Travailleurs de tous les pays, désunissez-vous!

Le 1er mai est, traditionnellement, une occasion pour les syndicats de manifester, de marcher dans la rue pour rappeler leurs revendications. Mais c'est aussi un bon moment pour se pencher sur les rôles et responsabilités qu'ont les syndicats envers leurs travailleurs au Québec.

Car au-delà de l'image de « défenseur » de tous les travailleurs se cachent parfois des tactiques et des façons de faire qui semblent davantage servir à préserver les intérêts d'un lobby contrôlant qu'à défendre les intérêts des cotisants au syndicat.

Justement, il s'en est fallu de peu pour qu'on puisse ajouter « transparence financière » et « vote démocratique » aux qualificatifs de nos syndicats, ce qui aurait contribué à améliorer leur image. Malheureusement, le nouveau gouvernement fédéral a décidé de faire un pas en arrière et de nier aux travailleurs des avancées démocratiques pourtant exigées par ces derniers.

En effet, en ne demandant plus aux syndicats de fournir un portrait de leurs dépenses, et en n'obligeant plus la tenue d'un vote à scrutin secret pour obtenir une nouvelle accréditation syndicale (rejet du projet de loi C-377 et adoption du projet de loi C-525), le gouvernement Trudeau fait peut-être plaisir aux centrales syndicales, mais certainement pas aux travailleurs syndiqués eux-mêmes.

Un sondage Nanos effectué en 2011 avait montré que pour 83 % des Canadiens et 86 % des syndiqués, il importe de mieux comprendre la façon dont est géré et dépensé l'argent des cotisations syndicales, par une plus grande transparence des états financiers des syndicats.

Rappelons qu'au Canada, la « formule Rand » force tous les employés d'un milieu de travail syndiqué, qu'ils soient ou non membres du syndicat, à payer les cotisations. Or, ces cotisations servent aussi à financer diverses causes idéologiques ou sociales qui n'ont aucun lien direct avec la représentation des travailleurs. Les syndicats bénéficient en quelque sorte d'un pouvoir de taxation qui rend obligatoire le paiement des cotisations syndicales. Un privilège de cette nature devrait s'accompagner d'une plus grande transparence quant à la provenance et à l'utilisation de ces fonds.

Quant au vote au scrutin secret, une mesure qui vise surtout à protéger le travailleur de l'intimidation lors de la mise en place d'un syndicat dans une entreprise, plus de sept Québécois sur dix estiment que le gouvernement devrait rendre obligatoire la tenue d'un vote au scrutin secret auprès des employés visés par une demande d'accréditation syndicale, selon un sondage Léger Marketing effectué en 2009.

Imaginez : l'appui à une telle modification était encore plus fort chez les travailleurs syndiqués, à 80 %!

Rappelons enfin que, de façon plus générale, les syndicats se sont engagés dans une lutte pour augmenter les dépenses publiques, quitte à faire des déficits et à augmenter les impôts. Normal, puisque l'augmentation des dépenses du gouvernement leur permet d'obtenir des hausses de salaire pour leurs membres dans le secteur public. Or, c'est toujours le travailleur moyen qui finit par payer des taxes et des impôts pour financer ces demandes. Et ce, même si ce travailleur n'est pas souvent en accord avec les centrales syndicales sur cette question, comme en font foi des sondages qui montrent que la plupart des travailleurs sont plutôt d'accord avec la rigueur budgétaire et en ont assez de payer des impôts toujours plus élevés.

Ça commence à faire beaucoup de dossiers où les travailleurs ne sont pas en diapason avec les syndicats qui les représentent…

Dans ce contexte, les lois visant à introduire la transparence chez les syndicats et le vote secret représentaient un pas dans la bonne direction, afin de mieux aligner les intérêts des centrales syndicales avec ceux des membres qu'ils représentent. L'abrogation de ces lois constitue un recul autant pour les travailleurs que pour les syndicats, et pour la démocratie en général.

Les centrales syndicales ont de quoi fêter aujourd'hui. Les travailleurs syndiqués? Pas tant que ça.

Jasmin Guénette est vice-président de l'Institut économique de Montréal. Il signe ce texte à titre personnel.

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