De nouvelles taxes ne rendront pas le Plateau-Ferrandez plus accueillant aux entreprises
Alors que le maire de l'arrondissement du Plateau-Mont-Royal, Luc Ferrandez, est de plus en plus critiqué des commerçants et des artistes, il annonçait récemment son intention de lever une nouvelle taxe sur les locaux vacants. L'objectif est de tenter de redynamiser le Plateau, où les locaux commerciaux vides donnent à certains endroits l'impression d'une ville fantôme.
Cependant, il n'est pas du tout évident que cette taxe aurait l'effet voulu. Dans le contexte du Plateau-Mont-Royal, on peut même craindre l'effet inverse à long terme.
Le Plateau est un endroit où les taxes sont déjà très élevées. Cette année, les taxes municipales y ont augmentées de 4,2 % pour le non résidentiel, la plus forte hausse à Montréal. L'automne dernier, la mairie de l'arrondissement a créé une nouvelle taxe qu'ils ont baptisée «Coderre» pour compenser la chute des transferts en provenance de la mairie de Montréal. De nouveaux parcomètres ont été ajoutés, et le prix des anciens augmentés. De nouvelles vignettes de stationnement destinées aux travailleurs entreront bientôt en vigueur.
À ces taxes viennent s'ajouter les nombreux règlements de l'arrondissement qui coûtent cher aux entreprises, comme l'interdiction des chaises en PVC sur les terrasses. Le Plateau Mont-Royal est l'arrondissement de Montréal qui génère le plus de plaintes à propos de ses règlements et de ses permis. La création d'entreprise sur le Plateau-Mont-Royal est découragée par le poids fiscal et réglementaire de la mairie.
En plus de ces inconvénients, le Plateau est entouré d'autres quartiers achalandés, où les taxes et règlements sont moins contraignants. Ville-Marie, Rosemont-La Petite-Patrie, Outremont ou Côte-des-Neiges-Notre-Dame-de-Grâce, pour ne nommer qu'eux, sont des arrondissements qui peuvent paraître à certains égards plus accueillants pour les entreprises.
Le Plateau a beau être un quartier très apprécié et très densément peuplé, les taxes, les règlements et la proximité d'autres arrondissements plus accommodants font que les nouvelles entreprises préfèrent s'installer ailleurs. C'est pour ça qu'on y trouve autant de locaux vacants.
Pourtant, au lieu d'œuvrer à rendre l'arrondissement plus accueillant et attirer les entreprises, on cherche à taxer les locaux vacants. On cherche donc à régler un problème qui est partiellement dû à des taxes trop élevées… en ajoutant une nouvelle taxe!
La taxe sur les locaux vacants ne rendra pas le Plateau plus intéressant pour les entreprises, puisqu'elle ne règle pas et vient même aggraver les problèmes fondamentaux de l'arrondissement. Au mieux, si son taux est assez élevé pour être persuasif, elle incitera les propriétaires de locaux vacants à diminuer leurs loyers pour attirer de nouveaux locataires. Mais il s'agit là d'une stratégie de court terme.
Cette stratégie aura aussi pour effet de décourager l'achat de locaux commerciaux sur le Plateau. Qui voudra investir dans un quartier où l'échec commercial, comme si ce n'était pas déjà assez coûteux, est de surcroît puni par une taxe sur les locaux laissés vacants? On préférera plutôt s'orienter vers les arrondissements de Montréal qui n'ont pas de telle taxe. À long terme, cela pourrait même aggraver le problème de locaux inoccupés.
Dans tous les cas, si on souhaite vraiment dynamiser le Plateau-Mont-Royal, ce n'est pas en inventant de nouvelles taxes qu'on rendra l'arrondissement plus accueillant. C'est une grave erreur que de penser qu'on peut régler tous les problèmes avec de nouvelles taxes, sans tenir compte du fardeau fiscal qu'on impose déjà et du fait que d'autres arrondissements sont plus abordables. Mais quand on n'a qu'un marteau en tête, on voit tous les problèmes en forme de clou…
Mathieu Bédard est économiste à l'Institut économique de Montréal. Il signe ce texte à titre personnel.