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Textes d'opinion

Forêts : un discours alarmiste injustifié

Plusieurs médias ont récemment cité une publication de l’Université du Maryland, faite en collaboration avec des groupes écologistes dont Greenpeace et Global Forest Watch, et qui soutiennent que les « paysages forestiers intacts » se « dégradent » à un rythme ahurissant. Le Canada serait responsable de 21,4 % de la perte totale de forêts intactes entre 2000 et 2013.

Y a-t-il lieu de s’inquiéter de l’avenir de nos forêts? Pour vérifier si cette affirmation est exacte, il faut d’abord comprendre les termes utilisés et mettre en perspective les statistiques présentées.

L’étude de l’Université du Maryland définit « paysage forestier intact » comme une zone constituée d’écosystèmes forestiers et non forestiers dont la superficie est suffisamment grande, généralement 500 km2, pour permettre la survie d’une biodiversité spécifique et d’une grande variété d’espèces. Dans la mesure où leur intensité est faible, on peut même y inclure des zones étant sujettes à des activités agricoles, aux activités récréatives comme la chasse et même aux coupes sélectives. Non seulement cette définition n’exclut-elle pas l’activité humaine mais au contraire, elle démontre qu’il est possible de tirer profit des ressources forestières sans anéantir la forêt.

D’une part, les forêts sont constamment perturbées, que ce soit par des feux de forêts, des maladies, des insectes ou par l’activité humaine. Ces perturbations sont même généralement bénéfiques pour la biodiversité et la régénération de la forêt.

D’ailleurs, la superficie des forêts boréales perturbées par des facteurs naturels, là où se trouve la majorité des « paysages forestiers intacts », est en moyenne cinq fois plus grande chaque année que celle perturbée par l’exploitation forestière qui elle, s’étend sur moins de 1 % de la forêt totale. Autrement dit, les espèces et la biodiversité caractérisant nos forêts ont été perturbées davantage par la nature que par l’homme.

D’autre part, le terme « paysage forestier intact » peut être trompeur en laissant entendre que la forêt perturbée par l’homme ne retrouvera jamais ses attributs initiaux.

En réalité, il est possible d’exploiter ces forêts tout en préservant leurs attributs initiaux. À l’instar de l’agriculture, l’exploitation de la matière ligneuse permet à la forêt de se régénérer constamment, récolte après récolte. Les nouvelles méthodes d’exploitation forestière permettent maintenant de réduire l’écart entre la forêt aménagée et la forêt naturelle en recréant des paysages qui renferment toute la diversité et l’irrégularité des vieilles forêts. Les données les plus récentes montrent d’ailleurs que le couvert forestier s’est non seulement maintenu, mais a légèrement augmenté entre 1979 et 2002 au Québec.

Enfin, en exploitant une partie aussi infime de l’immensité de nos forêts, les cycles de perturbation liés à l’activité forestière sont suffisamment espacés pour permettre la régénération de la forêt. La technologie et les méthodes d’aujourd’hui permettent une exploitation forestière respectueuse de l’environnement qui conjugue les besoins économiques des régions et les attentes sociales quant au respect de la biodiversité.

Le discours des écologistes dresse un portrait alarmiste de l’état de nos forêts alors que dans les faits, comme l’ont démontré mes collègues Jasmin Guénette et Pierre Desrochers, elles se portent plutôt bien, tout comme les animaux qui les fréquentent.

Michel Kelly-Gagnon est président et directeur général de l'Institut économique de Montréal. Il signe ce texte à titre personnel.

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