Le buffet à volonté
À moins de vivre dans un monde parallèle, force est de reconnaître que le Québec vit au-dessus de ses moyens. Il y a toujours quelques cigales qui nous invitent encore à chanter tout l’été, mais la majorité des Québécois, et le ministre des Finances, se rendent à l’évidence : la situation ne peut plus durer. L’étude du Centre sur la productivité et la prospérité parue cette semaine ne laisse plus aucun doute sur ce diagnostic dans l’esprit du lecteur raisonnable.
Avec une dette de 261 milliards de dollars et d’autres déficits prévus, les finances publiques sont sur une trajectoire insoutenable à long terme. Maintenant qu’on s’entend sur le problème, parlons de solutions.
L’échec de l’État
L’étude montre bien que les Québécois sont plus pauvres que leurs voisins et aussi que l’État y joue un rôle beaucoup plus grand qu’ailleurs. Ce qu’elle ne dit pas clairement, c’est à quel point ces deux éléments sont directement reliés. Les services publics ne sont pas toujours efficaces et, à mon avis, la première chose à faire serait de cibler certains organismes, programmes et subventions à abolir.
D’autres programmes doivent être maintenus, mais peuvent être révisés. Par exemple, l’étude recommande une plus grande tarification de certains services publics. Payer pour les services publics en plus de tous les impôts qu’on paie déjà, ce n’est pas très enthousiasmant. Par contre, si ça fait baisser les impôts, je suis d’accord. Pour la simple et bonne raison que je n’aime pas… les buffets à volonté.
Je m’explique. Quand votre beau-frère va dans un buffet à volonté, le repas commence généralement par la phrase «ils ne feront pas une cenne avec moi»! Il mange plus que de raison, prend les plats qui ont l’air les plus chers et gaspille la nourriture. Avec un menu à la carte, parce qu’il paie ce qu’il obtient, le même beau-frère fait preuve de plus de décence.
Moins gaspiller
C’est la même chose pour certains services gratuits. On paie pour ces services une seule fois, dans nos impôts, sans lien avec la quantité des services obtenus. On a accès à tout. En vouloir le plus possible vient naturellement et c’est facile de gaspiller, sachant que ce sont les autres qui paieront pour. Personne n’est mal intentionné, mais personne ne veut se faire avoir à ce petit jeu.
Comme le disait l’économiste Claude Montmarquette, auteur d’un rapport sur cette question, les impôts sont des tarifs déguisés. Sauf que les tarifs ramènent un peu d’équité entre ceux qui utilisent les services. Pour les hôpitaux, les écoles, la police ou même les députés, c’est normal de tous payer, mais pas pour les autoroutes, les dispendieuses éoliennes ou le camping dans les parcs nationaux.
Une solution qui ne coûte rien
Enfin, il y a des solutions qui sont à portée de main et qui ne coûtent rien. L’exploration pour trouver du pétrole ne coûte rien au gouvernement parce que des entreprises sont disposées à le faire. On peut très bien s’assurer du respect de l’environnement sans leur mettre inutilement des bâtons dans les roues.
Youri Chassin est économiste à l’Institut économique de Montréal. Il signe ce texte à titre personnel. * Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.