Le gouvernement n’a pas sa place dans le garde-manger des Québécois
La semaine dernière s'est tenu à Vancouver le 3e Sommet canadien sur l'obésité. Il ne fait aucun doute que la proportion croissante dans notre société de personnes qui font de l'embonpoint ou qui sont obèses est devenue un important problème de santé, avec des conséquences financières non négligeables. S'entendre sur la gravité d'un problème ne signifie toutefois pas que les solutions pour y remédier soient évidentes.
Malheureusement, celles dont on entend le plus souvent parler ces dernières années reposent sur les taxes, la coercition, la réglementation et, de façon générale, sur davantage d'implication de l'État dans la vie des gens.
Des groupes d'intérêt ont été fondés avec l'objectif spécifique de faire pression pour la mise en place d'une réglementation ou de nouvelles taxes sur certains produits alimentaires.
C'est par exemple le cas de la Coalition québécoise sur la problématique du poids, qui milite pour l'imposition d'une taxe sur les boissons sucrées et énergétiques. De nombreux autres groupes en Amérique du Nord proposent l'élimination des gras trans dans la nourriture de restaurants, l'interdiction des grands formats de boisson gazeuse, des avertissements explicites ou des restrictions sur la vente de certains produits, etc.
Il n'existe pourtant aucune preuve que ces solutions répressives vont être efficaces. Les taxes et la réglementation sont des instruments grossiers qui entraînent très rarement les changements de comportement que l'on espère de la part des individus et des entreprises.
On peut prendre du poids en consommant littéralement des centaines de combinaisons de produits et d'ingrédients différents. Si certains de ces produits deviennent plus chers ou difficiles à obtenir, il est très facile de les substituer pour d'autres lorsqu'on n'a pas fait le choix personnel de changer ses habitudes de vie. Aucun programme n'obtiendra de résultats à long terme à moins que les individus visés ne soient convaincus de son utilité et ne soient personnellement engagés à y participer.
D'autres types de solutions, fondées sur des incitations positives, peuvent par ailleurs être mises en oeuvre. Les gouvernements et les organismes privés pourraient ainsi en faire davantage pour promouvoir une saine alimentation et l'activité physique chez les jeunes à l'école. D'ailleurs, au Québec, la Fondation Lucie et André Chagnon a consacré d'importantes ressources en ce sens en collaboration avec le gouvernement provincial.
Des modèles se développent dans plusieurs pays pour intégrer des incitations financières à maigrir dans les polices d'assurance santé privées. On peut aussi penser à mieux former les médecins à aborder ce problème. Selon un sondage récent publié dans le journal de l'Association médicale canadienne, près de la moitié se sentaient mal à l'aise lorsque la question de l'obésité était soulevée et très peu savent comment réagir à part donner de vagues conseils.
Dans les milieux de travail, de plus en plus d'entreprises essaient d'intégrer diverses activités physiques dans la routine quotidienne de leurs employés. La pratique des rencontres «marche et parle» est par exemple en train de gagner en popularité.
Enfin, de nombreuses entreprises du secteur alimentaire se sont déjà engagées volontairement à améliorer leurs produits pour répondre à la demande de leur clientèle. Des études ont par exemple montré que celles qui offraient davantage d'options à faible valeur calorique ont connu une croissance plus élevée que les autres.
Il n'existe pas de remède miracle pour résoudre un problème aussi complexe et qui comporte de si nombreuses facettes que l'obésité. Si tous les intervenants faisaient cependant leur part pour promouvoir de meilleures habitudes au lieu de gaspiller leurs efforts à défendre des mesures répressives, nous aurions de bien meilleures chances de le maîtriser.
Jasmin Guénette est vice-président de l'Institut économique de Montréal. Il signe ce texte à titre personnel.