fbpx

Textes d'opinion

« Il faut taxer davantage les riches! »

Bien que cette formule ait été entendue à maintes repri­ses depuis le début de la campagne électorale, voilà quelque temps déjà qu’elle est devenue le nouveau mantra de la classe politique, que ce soit chez nous, aux États-Unis ou en Europe.

Si nos infrastructures tombent en décrépitude, si nos services publics sont déficitaires, si l’économie vacille, c’est parce que les riches ne paient pas assez d’impôts. Du moins, c’est le discours que nos dirigeants se plaisent à tenir. Ils n’ont plus besoin de remettre en question leurs décisions ni le mode de fonctionnement de l’appareil gouvernemental, ils ont trouvé leur bouc émissaire.

Guerre des classes

À force de cibler les riches et d’attiser le sentiment d’envie, nos dirigeants ont déclenché une guerre des classes. Une guerre qu’ils alimentent chaque fois qu’ils pointent du doigt cette minorité souvent silencieuse. Aujour­d’hui, les riches représentent les « méchants » de la socié­té.

Il faut dire que les riches sont une cible faci­le pour les politiciens. Ceux qui touchent des revenus supérieurs à 100 000 $ forment 4,1 % des contribuables. Ceux dont les revenus excèdent 250 000 $ représentent à peine 0,6 % des contribuables. Le poids électoral des nantis étant minime, perdre leur vote est sans conséquence réelle. Les prendre à partie est somme toute un signe de lâcheté politique.

Le plus regrettable dans cette croisade, c’est qu’elle n’est pas justifiée. Parmi les riches figurent des travailleurs acharnés qui ne comptent ni leur temps ni leurs efforts, des médecins dévoués, des entrepreneurs visionnaires, des artistes talentueux et des sportifs exceptionnels. À l’instar de la majorité de leurs concitoyens, la plupart des riches contribuent honnêtement à la prospérité de la province. Certes, certains d’entre eux posent des gestes répréhensibles, mais, dans l’ensemble, ceux qui gagnent bien leur vie ne sont pas automatiquement des « méchants », tout comme ceux qui gagnent peu ne sont pas néces­sairement vertueux.

Alors qui sont les vilains? Au Québec, comme partout ailleurs, il y a des tricheurs qui, comme Vincent Lacroix, s’affairent à imaginer une panoplie de moyens pour siphonner la richesse créée par les gens de bonne volonté. Mais surtout, il y a des rapaces qui fricotent avec le pouvoir pour obtenir des subventions, des mesures politiques en leur faveur ou tout autre privilège. Il y a des centrales syndicales qui détournent la richesse collective à coups de menaces de débrayage et il y a des lobbys qui réclament des politiques avantageuses pour leurs membres, mais souvent néfastes pour les contribuables et les consommateurs.

Politiciens faibles

Malheureusement, il y a aussi des politiciens trop faibles pour tenir tête aux groupes d’intérêts et trop arrogants pour recon­naître que chaque dollar qu’ils leur accordent n’est plus disponible pour aider ceux qui vivent dans la misère ou pour finan­cer les program­mes qui nous tiennent vraiment à coeur. 

Si les politiciens apprenaient à dire non aux rapaces, les coffres de l’État seraient bien garnis. Au lieu de cela, ils couvrent leurs erreurs en accusant les riches de payer trop peu d’impôts et en déclenchant une guerre des classes. C’est non seulement démagogique, c’est carrément dangereux. Ne nous laissons pas embrigader!

Nathalie Elgrably-Lévy est économiste senior à l'Institut économique de Montréal. Elle signe ce texte à titre personnel.
* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.

Back to top