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Textes d'opinion

Défendre l’indéfendable… sans succès!

D’après l’étude des économistes Pierre Fortin, Luc Godbout et Suzie St-Cerny sur l’impact des services de garde subventionnés (SGS), le programme serait un succès phénoménal. Il aurait permis à 70 000 femmes de travailler, ce qui aurait entraîné une hausse du PIB de 5,1 milliards de dollars et procuré à Québec un retour fiscal de 104 $ pour chaque tranche de 100 $ de subvention.

Toutefois, ne sablons pas le champagne trop rapidement. Le programme n’est peut-être pas la poule aux oeufs d’or qu’on imagine.

Premièrement, l’étude omet un calcul essentiel. De 1998 à 2011, le nombre de places à contribution réduite a augmenté de 122 %. Or, le coût annuel des subventions gouvernementales (ajusté pour tenir compte de l’inflation) a grimpé de 463 %. À cela, il faut ajouter les coûts de gestion ainsi que ceux liés à la création et au fonctionnement de la nouvelle liste d’attente centralisée.

Statistiques sélective

Deuxièmement, les statistiques sont habilement sélectionnées. Les auteurs constatent une hausse notable du taux d’activité des Québécoises âgées entre 15 et 64 ans, et l’attribuent aux SGS. S’il est vrai que le taux d’activité de ce groupe a augmenté de 11 points de pourcentage de 1996 à 2011, il faut toutefois se méfier des conclusions hâtives. Selon Statistique Canada, le taux d’activité des Québécoises de plus de 55 ans, qui sont certainement très peu nombreuses à bénéficier du programme, a augmenté de 13 points de pourcentage au cours de la même période. En Alberta, qui ne possède pas de système similaire, le taux d’activité des femmes de 15 à 64 ans est supérieur à celui enregistré au Québec. Quant aux Terre-Neuviennes du même groupe, qui n’ont pas non plus recours à un système étatique, leur taux d’activité a bondi de 14 points de pourcentage!

Demi-vérité

Troisièmement, les auteurs avancent une demi-vérité. Ils affirment que le PIB a augmenté de 5,1 milliards de dollars grâce aux SGS, mais oublient que pour financer ce programme, l’État doit prélever des impôts et des taxes. Or, il est prouvé que l’impôt sur le revenu décourage le travail, et que celui sur les profits décourage l’entrepreneuriat et la création d’emplois, tandis que les taxes de vente réduisent la consommation. Donc, si l’on tient compte de l’ensemble de la manoeuvre, le programme de ne crée rien du tout. Au mieux, l’État injecte autant qu’il a prélevé et déplace l’activité économique.

Finalement, l’étude pose une hypothèse sans fondement. Elle suppose qu’en l’absence de SGS, les femmes seraient restées à la maison. Or, rien n’est moins sûr vu qu’il existe une multitude de solutions de rechange au système étatique (garderies privées, gardiennes à domicile, famille, etc.).

On pourrait adresser bien d’autres reproches à cette étude qui n’est en fait qu’une piètre tentative pour défendre un système coûteux et inéquitable pour beaucoup de parents. C’est dommage! Dans un contexte où les succès de l’étatisme sont rarissimes, la preuve de l’efficacité des garderies subventionnées aurait aidé à changer la donne. Ce sera peut-être pour une autre fois…

Nathalie Elgrably-Lévy est économiste senior à l'Institut économique de Montréal.
* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.

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