Un Prix Nobel d’Économie se penche sur la péréquation à Montréal
Montréal, 25 octobre 2001 – Le professeur James Buchanan, Lauréat du prix Nobel d’économie en 1986, estime que les programmes de péréquation peuvent être pris en otage et rendus inopérants par le processus politique ou par une conception défectueuse. Reconnu comme l’un des «pères de la péréquation» parce que ses premiers écrits ont eu une grande influence sur la façon dont ce programme a été conçu au Canada, M. Buchanan s’est de nouveau penché aujourd’hui à Montréal sur les arguments qu’il avait exposés il y a 50 ans. Il a reconnu qu’il n’avait alors pas assez tenu compte du fait que les ingérences politiques peuvent neutraliser les bonnes intentions à l’origine de tels programmes.
Sans faire de commentaire direct sur le système canadien, le professeur Buchanan a noté que pour remplir ses objectifs, un programme de péréquation devrait être à l’abri d’une prise de contrôle par une coalition de groupes d’intérêt dans les provinces réceptrices, ce qui a pour conséquence l’utilisation des fonds à des fins politiques partisanes, uniquement au profit des supporters de cette coalition. La péréquation ne fonctionne que si tous les résidants des provinces réceptrices peuvent en bénéficier. En tant que conférencier principal lors de l’événement «Péréquation: aide véritable ou passeport vers la dépendance?», le professeur Buchanan a de plus expliqué qu’un programme de péréquation mal conçu peut faire plus de mal que de bien. En effet, pour que les résultats voulus se concrétisent, «une mise en oeuvre assez précise » est requise, sans laquelle «des détournements malsains de ressources peuvent survenir».
D’autres experts réputés pour leur connaissance du programme canadien de péréquation (qui s’élève à 10 milliards de dollars par année) ont pris la parole lors de cette conférence. Celle-ci était présentée conjointement par trois instituts de recherche en politique publique (l’Atlantic Institute for Market Studies, l’Institut économique de Montréal et le Frontier Centre for Public Policy) représentant toutes les provinces réceptrices. Plusieurs de ces experts ont relevé le défi lancé par le professeur Buchanan d’examiner les détails du régime canadien pour voir jusqu’à quel point celui-ci pourrait avoir dévié de l’intention originale ou pourrait avoir été miné par de constantes manipulations politiques au fil des ans. On a également soulevé le problème d’une conception déficiente, notamment en ce qui a trait à la façon dont les revenus provenant des ressources naturelles sont traités et aux incitatifs pervers qui font que des provinces réceptrices adoptent des politiques imprudentes dans le but de maximiser leurs revenus de péréquation.
Selon les dirigeants des trois instituts, le programme de péréquation canadien a besoin d’être réexaminé de façon sérieuse et rigoureuse à la lumière des remarques du professeur Buchanan et des autres participants à la conférence.
Le président de l’Atlantic Institute for Market Studies, Brian Lee Crowley, a souligné au nom de ses collègues qu’il était temps de voir plus loin que les bonnes intentions à l’origine du programme de péréquation et qu’il fallait analyser objectivement comment la réalité politique, aussi bien au niveau fédéral que provincial, a pu l’éloigner de ses objectifs louables. «Quand le père de la péréquation vient au Canada et nous dit: ‘Je n’ai pas suffisamment tenu compte de la façon dont la politique et une mauvaise conception peuvent faire dérailler un programme de péréquation’, et quand quelques-uns des principaux experts canadiens tels Ken Boessenkool de l’Institut C.D. Howe, l’ex-sous-ministre des Finances de la Saskatchewan Paul Boothe et Michel Boucher de l’École nationale d’administration publique, s’entendent tous sur le fait qu’il y a des défauts majeurs dans la façon dont la péréquation est administrée au Canada, nous pensons qu’il est temps de repenser en profondeur tous les aspects de ce programme. Nous allons continuer à attirer l’attention des décideurs et faiseurs d’opinion sur les multiples façons dont la péréquation peut en fait s’avérer un boulet économique au pied des provinces pauvres et sur les approches alternatives qui serviraient mieux notre objectif ultime: un Canada où chaque région a atteint un niveau de prospérité et d’autonomie économique tel que la péréquation cesse d’être nécessaire.»
Des exemplaires de l’exposé du professeur Buchanan peuvent être obtenus sur les sites Web des trois instituts (www.aims.ca, www.iedm.org, www.fcpp.org). Les autres communications présentées à cette conférence seront rendues publiques au cours des prochains mois.
La péréquation est un programme par lequel le gouvernement fédéral s’assure que les gouvernements provinciaux, nonobstant leur capacité fiscale propre, obtiennent des revenus suffisants pour offrir des services adéquats en éducation, santé ou transport à leurs résidants. Il s’agit en ce moment de l’un des plus importants programmes de dépense fédéraux et ses bénéficiaires sont la Saskatchewan, le Manitoba, le Québec, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse, l’Île-du-Prince-Édouard et Terre-Neuve.
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