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Textes d'opinion

Pour une réforme des écoles publiques

Le documentaire Les enfants du palmarès, de Marie-Josée Cardinal, a fait quelques vagues. Loin d’apporter un éclairage sur l’utilité des palmarès des écoles secondaires, il traite en fait de l’engouement de nombreux parents pour l’école privée et du stress imposé à des jeunes qui ne réussissent pas leurs examens d’admission. Cette «course aux meilleurs» ferait plus de perdants que de gagnants, selon le cliché usuel, bien que le documentaire ne convaincra personne sur la gravité de ce qui est ressenti par un élève qui n’est pas accepté.

En fait, ce que le film illustre tant bien que mal, c’est l’amour des parents pour leurs enfants et leur désarroi devant des insuffisances du système public. Des outils comme le palmarès ne sont que révélateurs d’une situation qui demande des actions énergiques au sein de l’école publique. En attendant, les parents essaient de tirer leurs enfants d’affaire comme ils le peuvent.

Il ne s’agit pas ici de défendre l’école privée. Deux de mes enfants ont fréquenté l’école publique, un autre l’école privée, et ont bien réussi par la suite. L’enjeu, c’est de stimuler les élèves, quels que soient leurs talents. Nos enfants ressentiront une impression d’échec s’ils ne réalisent pas leur potentiel.

Mais pour choisir l’école et l’encourager à se dépasser, encore faut-il que les parents aient une perception fiable des solutions de rechange et des meilleures pratiques. L’évaluation et la comparaison, même si elles ne peuvent être parfaites, font partie de tout processus d’amélioration. La pire des situations, c’est de ne pouvoir comparer.

Encadrement et liberté

Ce qui avantage l’école privée, c’est souvent la qualité de l’encadrement pédagogique et la liberté d’action de la direction de l’école pour retenir les meilleurs professeurs et remercier les autres. Cependant, ce n’est pas parce qu’une école est privée qu’elle est meilleure: les résultats du dernier palmarès en font foi, alors que huit établissements publics sur dix arrivent en tête du classement pour l’impact de l’équipe-école sur le succès des établissements, et huit sur dix pour l’amélioration de leurs résultats depuis cinq ans.

On a reproché aux palmarès de se baser uniquement sur les résultats aux examens uniformes du ministère de l’Éducation, étant donné que la grande majorité des écoles privées pratiquent la sélection de leurs élèves et que cela a un impact sur ce classement.

Une enquête de l’Institut économique de Montréal (IEDM) a cependant démontré en 2008 que, contrairement à une idée reçue, la moitié des écoles secondaires publiques pratiquent une sélection totale ou partielle! Le palmarès produit l’an dernier tient maintenant compte de ce facteur. Le palmarès 2008 a proposé un indicateur d’impact qui vient neutraliser cette influence ainsi que celles des facteurs liés au milieu socio-économique des élèves.

Cet indicateur d’impact est à la base d’un second classement des écoles, présenté de concert avec celui basé sur les résultats scolaires. Un cas frappant: l’école secondaire Henri-Bourassa, de Montréal-Nord, est classée au 172e rang pour ses résultats scolaires, mais au 10e rang pour l’impact de son équipe-école sur la réussite des élèves.

Outiller les parents

Pourquoi s’opposer à informer et à outiller les parents pour qu’ils exercent leur jugement et leur droit de questionner la performance de leur école, qu’elle soit publique ou privée?

Plutôt que de se mettre la tête dans le sable, il faudrait admettre le grand besoin de réformer la gouvernance de nos écoles publiques. Le danger dans ce contexte, c’est qu’on cède aux corporatismes syndicaux et à la pensée magique pour se mettre à l’abri de la concurrence. Évitons de simplement réclamer plus de financement et de refuser de donner l’initiative aux premiers concernés, les parents.

On pourrait s’inspirer de la Suède qui, devant un grave problème de sous-performance de son système scolaire, a, au début des années 1990, mis en place un système de bons scolaires, donné aux parents un droit de choisir leur école, permis la création de nouvelles écoles «indépendantes», et donné plus de pouvoir aux directions d’écoles pour rechercher et implanter les meilleures pratiques d’enseignement, de formation et d’encadrement.

Marcel Boyer est économiste principal à l’Institut économique de Montréal.

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