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Textes d'opinion

Le hold-up générationnel

Si vous avez moins de 40 ans, j’espère que vous possédez une petite fortune en RÉER. Parce qu’avec vos rentes de la RRQ, vous n’irez pas loin.

Voilà en gros le message que les politiciens nous ont lancé la semaine dernière. Il faudra probablement hausser (encore!) les cotisations au Régime de rentes, perçues sur votre chèque de paye. Dans ce système de pension collectif, les jeunes payent la pension des vieux. Et quand ils arrivent à leur tour à la retraite, les jeunes derrière eux payent, et ainsi de suite.

Pourquoi faut-il hausser les cotisations? Quand nos sages bureaucrates ont instauré ce régime en 1960, ils ont omis de prévoir que nous ferions moins d’enfants et vivrions plus vieux. Les politiciens qui se sont succédé, eux, ont bien vu que le régime fonçait dans un mur. Mais ils ont préféré pelleter le problème en avant – sur le dos des générations futures –, de peur de perdre des votes.

Résultat: la caisse sera vide en 2037. Dans 27 ans. Et ça, c’est le scénario optimiste. Avant les récents déboires de la Caisse de dépôt – qui gère l’actif de la RRQ. Un scénario qui mise sur une reprise économique spectaculaire, qui apparaît de moins en moins probable.

La vérité, c’est que nous sommes les poissons d’une vente pyramidale nommée RRQ. Comme dans toute vente pyramidale, les derniers qui entrent se font avoir. Les premiers entrés dans la pyramide, nos grands-parents, payaient à peine 3,6% sur leur chèque de paye. Ils ont reçu leurs pleines prestations, certains après seulement 15 ans de cotisations. Nos parents, eux, payaient encore 4,4% en 1990. Nous, nous devrons cotiser pas loin de 13%, toute notre vie, pour payer la retraite de nos parents et grands-parents. Pour obtenir quoi en retour? Des miettes. S’il en reste.

C’est une situation inéquitable. On demande à une seule génération de payer pour les excès de toutes les autres.

J’allais, dans cette chronique, vous proposer une révolution: mettre fin à la pyramide. Permettre aux travailleurs de sortir du régime et de cotiser dans un compte individuel, protégé des magouilles des politiciens. Une trentaine de pays ont entrepris cette réforme. Pourquoi pas nous?

Parce que pour stopper la machine, il faudrait d’abord honorer toutes les cotisations payées jusqu’ici par les travailleurs québécois. Coût estimé: 250 milliards, selon un contact à la RRQ. Vu l’état lamentable de nos finances publiques – un autre leg de nos politiciens à courte vue –, cette option n’est guère envisageable. Notre trou est trop profond. Impossible d’en sortir.

La moindre des choses serait que les retraités actuels acceptent de recevoir moins que prévu. Question de partager la facture avec nous. Un premier pas serait de baser le calcul des prestations qu’ils reçoivent sur la moyenne de toutes leurs années de gain. Et non sur les cinq meilleures, comme c’est le cas actuellement.

Mais ne rêvons pas en couleur. Nos politiciens sont aussi irresponsables et opportunistes que leurs prédécesseurs. La génération des moins de 40 ans a peu de poids politique. Et elle va payer pour.

David Descôteaux est économiste à l’Institut économique de Montréal.

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