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Textes d'opinion

Une crise surréaliste

L’ADQ comme le PQ tentent de nous convaincre de renoncer aux «abominables» réductions d’impôt promises par le PLQ. À les écouter, les sommes transférées par Ottawa il y a tout juste deux mois sont maintenant absolument indispensables au trésor public pour rétablir l’équilibre budgétaire et assurer le bien-être de nos enfants.

Qu’il soit nécessaire d’équilibrer le budget et de revoir les pratiques comptables est un fait indiscutable! Mais la ministre des Finances, Monique Jérôme-Forget, peu atteindre ces objectifs même sans les 950M$ envoyés par Ottawa. Il suffit d’avoir le courage de faire les gestes appropriés. Alors pourquoi devrions-nous sacrifier nos baisses d’impôt quand nous sommes les contribuables les plus taxés en Amérique du Nord? Voler à la rescousse d’un gouvernement inapte à gérer ses finances ne l’incitera certainement pas à adopter une gestion responsable.

Pourtant, renoncer aux baisses d’impôt issues d’un transfert fédéral revient à cautionner une hausse des impôts que nous versons à Québec. Est-ce vraiment ce que nous souhaitons?

Le PQ et le modèle québécois

Que le PQ souhaite s’approprier le fruit de notre travail est tout à fait dans la logique du parti, puisqu’il a toujours été fortement attaché au «modèle québécois» et au concept de l’État-nounou.

Que 70% des répondants au récent sondage Léger Marketing aient déclaré s’opposer à la réduction du fardeau fiscal peut s’expliquer.

D’une part, 40% des contribuables ne paient aucun impôt et 20% en paient très peu, alors que 40% des contribuables paient 92% de tous les impôts. Ainsi, quand 60% des Québécois profitent d’un système sans y contribuer ou presque, on peut comprendre qu’ils soient nombreux à vouloir continuer à se faire entretenir par la minorité qui paie des impôts.

Question tendancieuse

D’autre part, la question posée dans le sondage était outrageusement tendancieuse. On demande aux répondants s’ils sont d’accord avec la baisse d’impôt ou s’ils auraient souhaité que le gouvernement utilise cet argent pour améliorer les services en éducation ou en santé.

Or, on ne leur précise pas que l’État alloue déjà 69% de son budget à la santé et à l’éducation, et que le budget de Mme Jérôme-Forget prévoit une hausse généreuse de 6% à la santé et de 5% à l’éducation. On reste muet sur le fait que le système de santé n’a connu aucune amélioration notable malgré une augmentation de l’enveloppe budgétaire de 15 à 21 milliards au cours des 6 dernières années. Les résultats du sondage auraient-ils été différents si les répondants avaient été correctement informés? Évidemment!

La volte-face de Dumont

Quant à la position de l’ADQ, elle est en contradiction flagrante avec le discours qu’a tenu son chef pendant plusieurs années lorsqu’il affirmait vouloir alléger le fardeau fiscal de la classe moyenne. Ce sont d’ailleurs de tels propos qui ont permis à Mario Dumont de réaliser une performance spectaculaire lors des élections du 26 mars. Mais, à en juger par sa volte-face, il faut croire que les discours qu’il nous a servis pendant longtemps n’étaient que des mots vides de conviction. Il disait vouloir rompre avec le «modèle québécois». Pourtant, en s’opposant aux baisses d’impôt, il contribue à sa survie.

Sans doute croit-il qu’en faisant tomber le gouvernement, il réussira à gagner les prochaines élections. Or, il y a deux mois, le peuple n’a pas voté pour un chef, il a voté pour des idées. Si Mario Dumont renie les principes qui l’ont rendu populaire, les électeurs le bouderont. Il devrait méditer là-dessus avant de s’opposer au budget de Mme Jérôme-Forget!

* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.

Nathalie Elgrably est économiste à l’Institut économique de Montréal et auteure du livre La face cachée des politiques publiques.

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