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Textes d'opinion

De vraies questions!

Pour la première fois depuis fort longtemps, j’ai pris une résolution du Nouvel An. Je suis fermement décidée à essayer de comprendre tout ce qui m’a échappé, voire carrément dépassée, au cours de la dernière année. La tâche s’annonce titanesque, mais je pense que l’exercice en vaudra la peine!

D’abord, l’un des savants concepteurs du nouveau bulletin scolaire pourrait-il m’expliquer clairement ce que signifie «construire sa conscience citoyenne à l’échelle planétaire»? Et comment cela s’enseigne-t-il?

Comment se fait-il qu’on nous demande d’être toujours plus solidaires alors que nous travaillons du 1er janvier au 27 juin uniquement pour payer nos impôts? N’est-ce pas de la «solidarité» que de donner près de 50% de son revenu à l’État? Sinon, quel pourcentage faut-il?

Si la hausse du salaire minimum aide les travailleurs au bas de l’échelle, n’est-il pas alors mesquin d’annoncer une maigre augmentation de 25 cents l’heure? Ne pourrions-nous pas totalement éradiquer la pauvreté en portant le salaire minimum à 15 $ l’heure?

Je me demande également pourquoi tant de gens s’évertuent à préserver notre système de santé actuel. Être solidaire implique-t-il qu’on laisse des gens mourir sur des listes d’attente alors qu’ils pourraient être sauvés si des cliniques privées avaient le droit de les soigner?

Un digne représentant des bien-pensants pourrait-il m’expliquer pourquoi ils dénoncent les salaires des PDG alors qu’ils restent muets face aux montants mirobolants empochés par certains artistes? Les Rolling Stones ont pourtant gagné 437 millions pour les 113 concerts donnés lors de leur récente tournée, ce qui constitue une somme deux fois plus élevée que le salaire annuel versé au PDG le mieux payé au monde! J’essaie de comprendre, mais I can’t get no

Et comment peut-on prétendre que les garderies à 7 $ aident les démunis quand les calculs des fiscalistes montrent que ce sont surtout les familles aisées qui profitent du système, tandis que les ménages disposant d’un revenu inférieur à 50 000 $ subissent des pertes? Les mesures «progressistes» visent-elles donc à prendre aux pauvres pour donner aux riches?

POURQUOI?

J’aimerais également qu’on m’explique pourquoi les services publics se dégradent alors que le fardeau fiscal des Québécois ne cesse d’augmenter et que nous sommes les contribuables les plus imposés en Amérique du Nord.

Si le monopole de la SAQ permet effectivement d’obtenir une plus large sélection à meilleur prix, qu’attendons-nous pour nationaliser les supermarchés?

En matière de finances publiques, je trouve étrange que la dette québécoise augmente chaque année alors que le ministre des Finances affirme que le budget est équilibré. M. Audet pourrait-il m’aider à résoudre ce mystère?

Quant à l’environnement, pourquoi s’acharne-t-on sur celui qui déclare être incapable de respecter les objectifs de Kyoto alors qu’on est bien indulgent envers celui qui annonce son intention de se conformer au protocole mais qui n’en fait rien?

Il y a aussi l’énigme Wal-Mart. Comment réconcilier le fait que les stationnements soient toujours pleins alors que tout le monde prétend détester ce magasin et ne jamais y mettre les pieds?

Finalement, pourquoi me reproche-t-on de défendre les entreprises alors que je suis l’une des rares à dénoncer les subventions corporatives, les protections tarifaires, les monopoles, les offices de commercialisation, les prix de soutien, etc. Pourquoi ne reproche-t-on pas aux syndicats d’être dans la poche des entrepreneurs? Après tout, ce sont eux qui réclament à l’État de verser des subventions et d’imposer des tarifs douaniers afin d’aider les entreprises en difficulté et autres brebis galeuses!

Poser de vraies questions est facile. Écouter de vraies réponses, voilà le défi!

* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.

Nathalie Elgrably est économiste à l’Institut économique de Montréal et auteure du livre La face cachée des politiques publiques.

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