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Textes d'opinion

Un nouveau «péril jaune»?

Les médias américains accordent ces jours-ci beaucoup de place à la question des emplois transférés vers l’Inde et la Chine. Ces deux économies, longtemps freinées par le protectionnisme, les impôts et la réglementation excessive qui caractérisent le socialisme et le communisme, ont été libéralisées au cours des dernières années. Elles connaissent maintenant des taux de croissance avoisinant 10%.

L’inquiétude de beaucoup d’Américains devant cette nouvelle concurrence est partagée au Canada. En Beauce, où j’étais récemment, des entrepreneurs m’ont demandé comment ils allaient réussir à concurrencer ces pays alors que leurs travailleurs sont payés beaucoup moins cher que les nôtres?

Pour un entrepreneur, la présence d’un nouveau concurrent dynamique est toujours déstabilisante, et c’est compréhensible. Mais le protectionnisme n’est pas une bonne solution. Mes amis beaucerons, dont plusieurs exportent aux États-Unis, sont les premiers à le savoir. Même si des entreprises américaines perdent des contrats à cause d’eux et voudraient les voir disparaître, ils savent que cette ouverture des frontières est un phénomène positif – non seulement pour nos entrepreneurs et nos travailleurs, mais aussi pour l’acheteur américain qui peut économiser et obtenir un produit de meilleure qualité que s’il n’avait accès qu’à des fournisseurs américains.

Les bas salaires en Inde et en Chine ne sont qu’un aspect de la réalité économique qu’il ne faudrait pas exagérer. Ils reflètent la productivité assez limitée de ces travailleurs, qui sont beaucoup moins formés que les nôtres et qui ont accès à une machinerie et à des méthodes de travail moins sophistiquées. Si les bas salaires étaient si importants, toutes les multinationales s’en iraient en Haïti. En fait, il n’est pas avantageux pour une compagnie de fermer une usine au Canada pour aller en ouvrir une en Chine si ses travailleurs sont payés cinq fois moins, mais sont six fois moins productifs.

Il est vrai que dans certains secteurs les entreprises asiatiques deviennent plus compétitives que les nôtres. Ainsi, nous avons intérêt, comme consommateurs, à avoir le choix d’acheter leurs produits. Nous pourrons obtenir des produits moins cher et dépenser ailleurs l’argent ainsi économisé. Les Chinois qui s’enrichiront nous achèteront plus de métaux, de pâtes et papier, d’avions ou de services de génie conseil. Cette nouvelle production permettra de créer des emplois qui compenseront pour ceux perdus dans les sociétés incapables de faire face à la concurrence. La spécialisation et la division du travail qui résultent du libre-échange créent des perdants, mais bénéficient à l’ensemble de la société.

Ce n’est pas d’hier que les entreprises nord-américaines s’inquiètent de la concurrence de l’Asie. Comme le rapportait récemment le Wall Street Journal, le Southern Manufacturers Club de Charlotte, en Caroline du Nord, tenait un débat sur la menace des importations de textiles en provenance d’Asie, en… 1901! Cent ans plus tard, l’Amérique du Nord reste toujours beaucoup plus riche parce que la liberté d’entreprendre et de commercer a été mieux garantie ici qu’en Asie au cours du 20e siècle. Alors que les Asiatiques souhaitent eux aussi accéder à la richesse en libéralisant leur économie, allons-nous leur fermer la porte?

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