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Textes d'opinion

Contrainte aux commerçants

Le numéro du 19 mai de la Gazette officielle du Québec, à la page 2365 (c’est vraiment le bon chiffre et nous ne sommes qu’au début de l’année) annonce un règlement qui obligerait les commerçants qui vendent du tabac à installer, près de leur caisse enregistreuse, une affiche devant avoir «une hauteur de 15 centimètres et une largeur de 20 centimètres» faisant état de l’interdiction de la vente aux mineurs «en caractères majuscules ARIAL GRAS noirs de 30 points».

Pour aider nos enfants, l’État ne recule devant l’imposition d’aucun sacrifice aux commerçants.

Les règlements antitabac sont déjà nombreux depuis quelques années. Il faut dire que l’État est constamment soumis à des revendications de la part de groupes de pression extrêmement belliqueux… qu’il finance lui-même avec les fonds publics. En 2001-2002, par exemple, le gouvernement du Québec a versé 1,6 M$ au Conseil québécois sur le tabac et la santé et à l’Association pour la santé publique du Québec, qui gère la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac.

En parallèle, les compagnies de tabac ont été d’une passivité étonnante devant les attaques dont leurs clients ont été victimes.

Les dirigeants des fabricants de tabac, à l’instar de plusieurs, semblent entretenir une conception de l’État que la théorie économique moderne du «public choice» qualifierait de naïve. L’État est conçu comme une sorte de grand organisme social et rationnel, alors que la réalité est un peu plus complexe et un peu moins rose. Ceci dit, l’objectif d’empêcher les adolescents de fumer est légitime.

Mais revenons au projet de règlement. L’État exproprie déjà la moitié de l’emballage des paquets de cigarettes pour faire sa propre publicité. En réglementant l’affichage dans les petits commerces, il procède à une expropriation partielle de l’espace commercial de ceux-ci et ce, sans aucun dédommagement.

Si ce projet est adopté, des milliers de commerces et de dépanneurs se feront dicter quoi afficher. Le texte va encore plus loin, en décrétant que «nulle autre mise en garde portant sur les effets nocifs du tabac sur la santé que celle fournie par le ministère ne peut être affichée dans un commerce», éliminant ainsi tout le volet visible de programmes d’action privés contre la vente de tabac aux mineurs.

Un programme privé qui a du bon sens

On peut se demander si les restrictions de plus en plus strictes que l’État impose graduellement à la présentation des produits du tabac à l’intérieur des commerces ne finira pas par amener les fabricants à supprimer ou à diminuer significativement les incitations financières qu’ils donnent aux détaillants pour mettre leurs produits en vue. Ce serait un autre clou dans le cercueil du petit commerce.

Les compagnies de tabac avaient déjà mis sur pied un programme d’action contre la vente aux mineurs et celui-ci semblait porter des fruits (selon un audit indépendant d’AC Nielsen). Le gouvernement de l’Île-du-Prince-Édouard a d’ailleurs invité les fabricants à étendre ce programme privé (qui ne coûte rien aux contribuables) à toute la province. L’actuel gouvernement du Québec, qui se prétend en faveur de partenariats public-privé, devrait sauter dans ce train plutôt que de pondre encore un nouveau règlement.

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