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Textes d'opinion

Environnement et profit

Selon une croyance répandue, la recherche du profit par les fabricants les inciterait à rejeter leurs rebuts dans la nature sans se soucier des conséquences à long terme de leurs actions. L’adoption de règlements toujours plus contraignants serait donc essentielle pour nous assurer d’un développement durable.

Cette croyance est étrange. Après tout, pourquoi des gens d’affaires qui ont payé cher leurs intrants ne feraient pas tout en leur possible pour les utiliser au maximum plutôt que de les retourner à perte dans la nature?

Aussi étonnant que cela puisse paraître compte tenu du discours éco-catastrophiste des dernières décennies, l’histoire nous apprend que cette seconde perspective est plus juste et que la recherche du profit entraîne généralement au moins deux conséquences environnementales positives.

La première est que la concurrence oblige les fabricants à faire toujours plus et mieux en réduisant leur consommation de ressources par unité produite. La seconde est qu’elle fait rapidement prendre conscience à leurs dirigeants les plus dynamiques que la pollution représente des coûts externes pour traiter les rebuts ou leurs émanations et qu’elle nuit à leur rentabilité.

Par exemple, l’histoire du raffinage du pétrole depuis le milieu du 19e siècle n’est qu’une suite ininterrompue d’innovations techniques. Celles-ci ont notamment permis de créer à partir de sous-produits qui étaient auparavant rejetés dans l’environnement des intrants essentiels à l’industrie moderne, qui vont des huiles aux lubrifiants en passant par les gaz de pétrole liquéfiés et les cires et les paraffines.

Les exemples de ce type sont légion, même au Québec. Ainsi, dans sa politique environnementale de 2002, Alcan s’engage à réduire toute incidence environnementale nuisible de ses activités et à améliorer continuellement ses modes de gestion des ressources afin de préserver et de maximiser leur valeur.

Entre autres actions, Alcan a remplacé de vieilles roues de turbine par des roues plus performantes dans une de ses centrales hydroélectriques, au Saguenay. La centrale peut ainsi produire plus d’électricité avec la même quantité d’eau, et il n’est plus nécessaire d’élever le niveau d’eau des réservoirs pour produire davantage.

La «nouvelle philosophie» d’Alcan codifie, pour l’essentiel, le comportement de toutes les entreprises novatrices, car il a toujours été profitable d’adopter et de développer des techniques plus efficaces et qui ont par le fait même des retombées environnementales bénéfiques. En fait, ce phénomène est si ancien que même Karl Marx s’est senti obligé, dans le troisième volume de son Capital, de rendre hommage aux fabricants de son époque pour l’utilisation intensive qu’ils faisaient de leurs rebuts pour «maximiser leurs profits».

Pour paraphraser l’économiste Adam Smith, les entrepreneurs capitalistes sont amenés par une main invisible à améliorer la qualité de l’environnement tout en poursuivant d’abord leur intérêt individuel. Plusieurs d’entre eux méritent le qualitatif de véritables bienfaiteurs, à la fois comme créateurs de richesse que protecteurs de l’environnement. Nonobstant les clichés sur les méchantes entreprises polluantes, l’histoire enseigne en effet que l’intérêt des entreprises et celui de l’ensemble de la société se rejoignent souvent.

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