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Fiscalité des GAFAM : quand l’aveuglement occulte la vérité

In collaboration with Antoine Hoizey*

Selon une étude réalisée par l’ONG ActionAid, parue le 20 mai 2021, les pays du G20 auraient dû percevoir 32 milliards de dollars de taxes supplémentaires si les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft) payaient leur véritable part d’impôts. Cette même étude affirme qu’une telle somme permettrait de vacciner tous les humains sur la planète contre la COVID-19. Mais à y regarder de plus près, il semblerait que les chiffres avancés concernant la supposée évasion fiscale des GAFAM découlent d’hypothèses saugrenues tandis que le coût d’une vaccination mondiale paraît, lui, sous-évalué. Alors, qu’en est-il réellement?

Selon ActionAid, les GAFAM devraient payer 32 milliards de dollars américains d’impôts dans les différents pays du G20 s’ils se comportaient comme des entreprises normales. L’ONG s’est appuyée sur les documents comptables des entreprises américaines (les rapports 10-K) et a réparti leurs profits en fonction du nombre d’utilisateurs dont elles disposent dans les différents pays et de la richesse moyenne de ces derniers. Puis, à partir du taux d’imposition en vigueur dans chacun de ces pays, ActionAid a calculé l’impôt qui devrait être payé, en fonction des bénéfices réalisés par les GAFAM. Au total, toujours selon l’ONG, ce sont 32 milliards de dollars qui auraient dû être payés dans le G20 au cours de la dernière année. Jusqu’à présent, la méthodologie semble ingénieuse, mais c’est dans les détails que le bât blesse.

Les calculs d’ActionAid reposent sur l’hypothèse que les GAFAM ne paient pas d’impôt sur les bénéfices, ce qui est totalement erroné. Les rapports annuels des cinq multinationales, les rapports 10-K, indiquent qu’elles s’acquittent de près de 33 milliards de dollars américains d’impôts dans le monde. Plus précisément, Apple, Microsoft, Google, Facebook et Amazon ont versé respectivement 10, 9, 7, 4 et 3 milliards d’impôts pour l’année écoulée. Le G20 représentant 90 % du PIB mondial, il en ressort que les GAFAM ont une fiscalité comparable avec celles des entreprises traditionnelles, contrairement à ce que soutient l’ONG, et conformément à ce que nous avons montré l’an passé.

Mais les fausses informations propagées par ActionAid ne se cantonnent pas seulement à la fiscalité des GAFAM. En effet, l’ONG affirme que 32 milliards de dollars américains suffiraient pour vacciner l’ensemble de la population mondiale. Dans son étude, elle évalue le coût de la vaccination à 3,6 dollars par personne. Ce montant correspond au prix de deux doses du vaccin AstraZeneca. Ceci appelle deux remarques fondamentales.

Premièrement, le prix d’une dose de vaccin varie considérablement d’un fournisseur à l’autre. La dose d’AstraZeneca coûte 1,6 dollar tandis que celle de Pfizer s’élève à plus de 20 dollars. Les auteurs de l’étude ont choisi comme prix de référence celui du fournisseur le moins cher. Mais en réalité, il est impossible de vacciner l’ensemble de la population avec le vaccin le moins cher, d’autant plus que celui-ci suscite des inquiétudes. Deuxièmement, le seul coût des doses n’est pas représentatif du coût réel d’une campagne de vaccination. L’ONG a omis, entre autres, tous les frais logistiques liés au transport ou à la conservation des vaccins, de même que les dépenses liées à la rémunération du personnel de santé mobilisé dans les centres de vaccination.

Ces deux éléments suffisent à démontrer que vacciner l’ensemble de la population mondiale nécessiterait des ressources financières bien supérieures à 32 milliards de dollars américains. Selon un calcul effectué par le Journal de Montréal, 3 milliards de dollars canadiens seraient nécessaires pour vacciner 37 millions de Canadiens, soit 80 dollars par personne. Si l’on extrapole, le coût réel pour la vaccination complète de l’ensemble de la population mondiale serait 15 fois plus élevé que celui estimé par ActionAid.

En dépit de ces omissions, les données de l’étude d’ActionAid ont été relayées dans différents pays, notamment au Canada. Cela illustre bien à quel point les GAFAM sont devenus des boucs émissaires universels. On peut désormais les accuser de tous les maux, et ce, en étant quasiment certain qu’aucune vérification ne sera effectuée a posteriori. Cette stratégie malhonnête ne fait que nuire au débat et ce sont souvent les consommateurs qui finissent par en payer le prix.

Olivier Rancourt is an Economist at the MEI, Antoine Hoizey is an intern at the Institut économique Molinari. The views reflected in this opinion piece are their own.

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