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Cour suprême – Nouvelle menace pour les travailleurs à la pige

La Cour suprême du Canada va bientôt rendre une décision dans une cause, Uber c. Heller, qui pourrait bien avoir pour effet d’importer les conditions que la Californie a imposées aux travailleurs contractuels, et qui ont eu pour effet de rendre des emplois à temps partiel inaccessibles à ceux-ci qui en ont besoin.

Le travail occasionnel ou à la pige existe depuis très longtemps, mais l’économie sur demande a mis les travailleurs autonomes à l’avant-plan. Ce type de travail est particulièrement important pour tous ceux qui ne peuvent travailler qu’à temps partiel : les parents seuls, les étudiants, les personnes âgées et les travailleurs saisonniers. Ces groupes ont toujours compté sur la possibilité de travailler à des heures flexibles, qu’ils soient serveurs, nounous, livreurs ou traducteurs.

L’internet et les applications ont permis d’élargir la gamme de services offerts en plus de grandement faciliter l’embauche pour du travail occasionnel.

Ce phénomène a été grandement profitable pour les consommateurs, qui peuvent maintenant engager plus facilement quelqu’un pour livrer l’épicerie, pelleter l’entrée, promener le chien, tondre la pelouse ou être raccompagné à leur voiture la nuit en toute sécurité. Et, bien sûr, on peut désormais commander un chauffeur qui arrive à l’heure ! L’économie sur demande a créé en moyenne plus de 60 000 emplois au Canada par année entre 2005 et 2016.

Jusqu’à présent, les lois du travail ont favorisé cet état de choses en protégeant les travailleurs occasionnels de la paperasse, nuisible à l’emploi, et les employeurs des risques inhérents à l’embauche d’employés permanents.

Malheureusement, les législateurs sont de plus en plus hostiles à cette nouvelle création d’emplois. Le California Assembly Bill 5 (AB5), qui est entré en vigueur en janvier, a eu pour effet de transformer les travailleurs autonomes en employés. L’objectif était d’améliorer les conditions des travailleurs à la pige. En pratique, cela a signifié la disparition de leurs emplois. Des licenciements massifs de travailleurs autonomes à temps plein ou à temps partiel ont eu lieu dans les médias et l’industrie du cinéma, et d’autres pourraient survenir.

Des bonnes intentions qui entraînent des effets néfastes

L’expérience californienne illustre pourquoi les gouvernements devraient éviter de s’ingérer dans l’économie sur demande.

Malgré les intentions louables, le fait d’obliger les employeurs à offrir des avantages sociaux aux travailleurs contractuels risque d’évincer des petits salariés de leurs emplois.

Des études ont aussi montré que même lorsque l’entreprise assume le coût des avantages sociaux, celui-ci se répercute directement sur la rémunération. Ainsi, même les travailleurs qui ne perdent pas leur emploi finissent par payer le coût des avantages sociaux au moyen de salaires réduits.

Perdre son travail ne nuit pas seulement au travailleur maintenant ; cela peut toucher ses perspectives d’emploi. En contrepartie, il a été démontré que travailler à temps partiel augmente considérablement les chances d’avoir la situation d’emploi souhaitée un an plus tard, que cet emploi soit à temps plein ou à temps partiel. En d’autres mots, une bonne façon d’obtenir l’emploi que vous souhaitez est d’occuper n’importe quel emploi dès maintenant.

Statistique Canada estime que seulement un travailleur à temps partiel sur quatre y est poussé par les conditions économiques. Les autres doivent s’occuper d’enfants ou d’autres membres de la famille, souffrent d’une incapacité ou vont à l’école, ou encore ont choisi volontairement de travailler à temps partiel. La flexibilité est la clé de l’économie collaborative : pour travailler, pour embaucher, pour acheter et pour vendre. Un sondage effectué aux États-Unis en août 2018 a montré que seulement 7 % des travailleurs contractuels américains préféreraient être considérés comme employés à part entière.

La réalité canadienne en est une de grande mobilité ascendante. Une étude de 2012 des données du recensement a divisé les Canadiens en cinq catégories selon leur revenu. En 10 ans, 83 % des personnes qui étaient au départ, en 1990, dans les 20 % les plus pauvres étaient passées à une catégorie de revenus plus élevés. Cependant, les emplois temporaires ou au bas de l’échelle sont souvent une condition préalable à la pérennité de ce phénomène.

Faciliter les choses

Trop souvent, les législateurs proposent des réformes qui peuvent sembler opportunes, mais qui aggravent le problème.

Au lieu de rendre l’embauche de pigistes et de travailleurs à temps partiel plus difficile, les gouvernements devraient la faciliter.

La liberté de contracter et de travailler à sa guise n’est pas seulement un droit fondamental, c’est aussi l’un des moyens les plus efficaces d’aider les travailleurs marginaux qui ont besoin de ce premier échelon.

Peter St. Onge is Senior Economist at the MEI, Daniel Dufort, Senior Director of External Relations, Communications and Development at the MEI. They are the authors of “The Sharing Economy: Destroying Jobs Won’t Help Low-Income Workers” and the views reflected in this op-ed are their own.

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