Commerce de l’alcool – Les murs entre les provinces doivent tomber
Il ne devrait pas être plus difficile pour une entreprise canadienne de faire livrer ses produits à London, en Ontario, qu’à Londres, en Angleterre.
Pourtant, pour les nombreux viticulteurs, distillateurs et brasseurs du pays, c’est trop souvent le cas.
Quiconque n’est pas impliqué dans ces quelques secteurs d’activité ne pense pas au fait que le commerce ne circule pas toujours librement entre les différentes provinces canadiennes. Nos gouvernements ont conclu une série d’accords commerciaux au fil des ans, s’engageant systématiquement à mettre fin au protectionnisme au pays.
Dans les années 1990, ils ont signé l’Accord sur le commerce intérieur, qui visait à réduire et à éliminer les obstacles à la mobilité de la main-d’œuvre, des biens, des services et des investissements sur le territoire canadien.
Dans les années 2010, les quatre provinces de l’Ouest ont conclu une série d’accords connus sous le nom de Nouveau partenariat de l’Ouest (New West Partnership), qui poursuivaient des objectifs similaires. Et en 2017, l’Accord de libre-échange canadien, le plus récent de la série, s’engageait à réduire et éliminer les barrières commerciales qui séparent nos provinces et territoires.
Vous aurez deviné que les progrès à cet égard continuent de se faire très lentement. Une multitude d’industries demeurent à l’abri de la concurrence interne, dans des secteurs aussi pointus que les courses de chevaux au Québec et – croyez-le ou non – la pêche en Saskatchewan, ou aussi vastes que le transport interurbain par autocar en Nouvelle-Écosse.
L’une de ces exemptions, qui subsiste dans toutes les provinces sauf une, porte sur la vente de boissons alcoolisées.
Alors que la plupart des boissons et des aliments produits au pays peuvent être transportés librement d’une province à l’autre, les viticulteurs, les brasseurs et les distillateurs canadiens ne peuvent généralement pas exporter librement leurs produits vers les provinces et territoires voisins.
Par exemple, si vous habitez au Québec et que la SAQ ne vend pas la bonne bouteille de vin de la vallée de l’Okanagan que vous avez dégustée la dernière fois que vous êtes allé en Colombie-Britannique, c’est peine perdue. Vous ne pouvez pas l’acheter, bien que ce vin soit produit ici même au Canada. Même si le vignoble est disposé à vous le vendre directement en ligne, la loi vous interdit de vous le faire livrer.
Des barrières tombent, d’autres persistent
Plus tôt cette année, ces barrières au commerce intérieur ont fait les manchettes lorsque les provinces de la Colombie-Britannique et de l’Alberta se sont engagées dans une véritable guerre commerciale après que quelques Albertains se furent procuré du vin directement auprès de producteurs de la province voisine.
La prise de bec a pris fin lorsque les premiers ministres des deux provinces ont signé un accord autorisant leurs viticulteurs respectifs à vendre directement aux consommateurs de l’autre province, à condition que les taxes sur l’alcool soient perçues et restituées.
Un tel accord existe également entre la Colombie-Britannique et la Saskatchewan pour la vente directe de vins et de spiritueux aux consommateurs. D’autres provinces ont adopté une approche différente pour libéraliser le commerce de l’alcool au-delà des frontières provinciales.
En Nouvelle-Écosse, le monopole provincial sur les boissons alcoolisées consent gracieusement à ce que ses consommateurs captifs se procurent des vins d’autres provinces canadiennes, pour autant qu’ils répondent à un certain nombre de critères.
La province du Manitoba, quant à elle, se distingue par le fait qu’elle permet depuis longtemps à ses résidants d’acheter des boissons alcoolisées canadiennes dans n’importe quelle autre province et de se les faire livrer à domicile.
Les avantages pour les consommateurs sont bien réels : ils bénéficient d’un plus grand choix de produits, ainsi que de la commodité des achats en ligne et de la livraison à domicile, sans compter qu’une concurrence accrue exerce une pression à la baisse sur les prix.
Les nouveaux producteurs canadiens de boissons alcoolisées en tirent également un avantage notable. Si ces obstacles au commerce ne sont que des sources d’irritation pour les viticulteurs, distillateurs et brasseurs plus importants et mieux établis, ils ont pour effet de limiter considérablement l’accès au marché pour les producteurs plus modestes.
Pensez aux nombreuses microbrasseries que vous avez eu le plaisir de découvrir dans votre province. Certaines d’entre elles pourraient certainement piquer la curiosité des détaillants et des restaurateurs ailleurs au pays. Il en va de même pour les excellents vins locaux et les distilleries artisanales.
Ces barrières ont trop longtemps constitué un obstacle à la croissance des microproducteurs et à celle de leurs communautés locales. Nous faisons tous partie du même pays. Nous devrions également faire partie du même marché.
Shal Marriott is a Research Associate at the MEI and the author of “Removing Interprovincial Barriers to Online Alcohol Sales.” The views reflected in this opinion piece are her own.