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Uber : quand Québec montre comment freiner le progrès

Une citation célèbre de Ronald Reagan sur la vision que le gouvernement a de l’économie disait : « Si ça bouge, taxez-le. Si ça bouge encore, réglementez-le. Si ça cesse de bouger, subventionnez-le. »

Visiblement, le gouvernement du Québec semble avoir compris la leçon. Il est passé, dans le cas de l’entreprise Uber, de la première action à la seconde décrite par l’ancien président des États-Unis. Et malheureusement, Uber ne bouge plus. Ne reste plus qu’à la subventionner pour qu’elle change d’avis. Ah, mais j’oubliais : le gouvernement subventionne déjà les taxis!

Blague à part, peu de gens se réjouissent aujourd’hui de l’annonce faite par Uber de cesser ses activités au Québec. Bien sûr, cette entreprise est loin d’être parfaite et son attitude souvent arrogante a pris beaucoup de gens à rebrousse-poil. Mais il reste qu’elle remplit un rôle essentiel, qui est d’injecter de la concurrence dans le monopole de l’industrie du taxi.

Rappelons-nous pourquoi tant de gens ont si bien accueilli Uber à son arrivée : les plaintes au sujet de l’état général des voitures taxis et du mauvais service se multipliaient; il était à peu près impossible de payer de façon électronique; malgré une forte hausse de la population du grand Montréal, le nombre de permis de taxis y était inférieur à celui de 1952, ce qui rendait difficile l’obtention d’une course à certains moments ; les attentes à Dorval pouvaient être d’une longueur indécente… L’arrivée d’Uber a forcé, et force toujours les entreprises de taxi à rejoindre le 21e siècle et à offrir un meilleur service.

Le mauvais message

Qu’est-ce qui nous attend maintenant? Fort probablement, un retour aux problèmes de l’époque pré-Uber. L’industrie du taxi ne sentant plus un nouveau joueur lui souffler dans le cou, elle ne ressentira plus l’urgence de moderniser son service et d’innover.

Ce qui est bien plus dommageable, à mon avis, c’est le mauvais message que notre gouvernement est en train d’envoyer aux entrepreneurs qui souhaitent investir chez nous, lui qui n’arrête pas de vanter le Québec comme étant LA destination idéale pour les entreprises innovantes. J’imagine déjà un entrepreneur potentiel débarquant à Montréal-Trudeau, découvrant qu’il ne peut se commander un Uber (ce qu’il fait régulièrement dans un grand nombre de villes), attendant longtemps en file pour un taxi, tout en admirant les beaux paysages de cônes orange. Toute une belle publicité!

Par ailleurs, certaines études ont démontré que les accidents de voiture diminuent après l’arrivée d’un concurrent pour le taxi, probablement parce qu’il est moins coûteux et plus facile de laisser sa voiture à la maison lors d’une soirée bien arrosée. De plus, le nombre de voitures va sans doute augmenter sur les routes, et les émissions de GES qui vont avec. Comme l’écrivait une de mes amies Facebook : «N’oublions pas ceux qui ont renoncé à leur voiture parce que le modèle d’Uber offrait un équilibre qui leur convenait ». Et avec le départ d’Uber, d’autres services tels Uber Eats pourraient aussi disparaître.

Le modèle d’affaires d’Uber demande beaucoup de souplesse. Il est appliqué dans des centaines de villes dans le monde. Pourquoi ne pas créer une réglementation qui s’applique autant aux taxis qu’à des entreprises comme Uber ou Lyft, moins contraignante que le cadre actuel? Nos entreprises sont déjà lourdement taxées et réglementées; elles bougent de moins en moins. Donnons-leur de l’air et donnons surtout le choix à des milliers de consommateurs.

Germain Belzile is a Senior Associate Researcher at the MEI. The views reflected in this op-ed are his own.

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