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Obésité: taxer les boissons sucrées n’est pas la solution

Nous apprenions récemment que le ministre de la Santé, Réjean Hébert, considérait la possibilité d'imposer une taxe sur les boissons gazeuses sucrées. Il avance qu'une taxe d'un cent par once de boisson pourrait faire diminuer de près de 10 % la consommation de ces boissons.

Franchissons un pas de plus : est-ce que la diminution de la consommation de boissons dites sucrées aura un impact sur le tour de taille? À ce chapitre, les études scientifiques sont beaucoup moins concluantes.

L'idée que les boissons gazeuses sucrées sont néfastes pour la santé et qu'elles mènent à l'obésité n'est pas nouvelle. Les différents groupes de santé publique sont particulièrement actifs sur ce front. Les tentatives de taxer et réglementer les boissons sucrées ou les aliments contenant trop de gras saturés ne sont pas nouvelles non plus. Mais sont-elles efficaces?

L'obésité est un problème de santé très préoccupant, mais complexe. Il serait réducteur de cibler un seul facteur pour expliquer l'embonpoint. Prenez les boissons gazeuses. On a voulu leur faire porter le blâme, alors qu'elles représentent seulement 2,5 % de l'apport calorique des Canadiens. La consommation de boissons gazeuses a par ailleurs diminué de 32 % au Canada entre 1999 et 2011, alors que les problèmes d'obésité ont continué d'augmenter.

Pourquoi alors se limiter aux boissons gazeuses? Visons plutôt l'ensemble des boissons sucrées, clament certains. Encore une fois ce n'est pas si simple. L'application d'une taxe à l'ensemble des boissons sucrées devient problématique puisque l'on risque de taxer des boissons, certes sucrées, mais qui apportent aussi des nutriments importants comme les frappés aux fruits ou les laits aromatisés. Le choix de taxer ou non certains produits relève alors de l'arbitraire.

Le maire de New York, qui souhaitait interdire formellement la vente de portions de 16 onces et plus de boissons sucrées, vient d'ailleurs de subir un revers. En effet, en plus de ne pas avoir été approuvée par le conseil municipal, la cour a jugé cette interdiction « arbitraire et capricieuse » puisqu'elle visait certains établissements (restaurants) et pas d'autres (magasins d'alimentation) et excluait des boissons qui contenaient en fait beaucoup plus de calories.

Ce ne sont pas les exemples qui manquent d'expériences non concluantes associées à une telle taxe ou à une réglementation répressive. En effet, en octobre 2011, le Danemark introduisait une taxe sur les produits contenant plus de 2,3 % de gras saturés tels le beurre, les pizzas, le lait, la viande et les produits transformés. En novembre 2012, le ministère des Finances du Danemark abolissait cette taxe en soulignant qu'elle n'avait pas contribué à modifier les habitudes alimentaires des Danois et les avait plutôt encouragés à faire des achats outre-frontière, mettant en danger des emplois au Danemark. Le ministère mentionnait également qu'elle avait entraîné un cauchemar bureaucratique pour les producteurs et détaillants. Dans la même foulée, le gouvernement annulait son projet de mettre en place une taxe sur les boissons sucrées.

Taxer les boissons sucrées ne donne en fait que l'illusion de s'attaquer au problème de l'obésité. Or, recourir à la taxation et à une réglementation répressive n'est pas un moyen efficace pour améliorer cette situation, bien qu'elle soit populaire auprès de certains groupes.

Il serait beaucoup plus opportun pour les autorités de favoriser des méthodes positives comme inciter les médecins de famille à mieux comprendre cette problématique et à éduquer leurs patients au sujet des risques médicaux qu'entraîne l'obésité, encourager davantage l'activité physique chez les jeunes et offrir des repas plus sains dans les écoles pour habituer les jeunes à de bonnes habitudes alimentaires.

Jasmin Guénette is Vice President of the Montreal Economic Institute. The views reflected in this column are his own.

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