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SGF: une influence négligeable

Le gouvernement québécois vient d’annoncer son intention de fusionner la Société générale de financement du Québec (SGF) et Investissement Québec. Toutefois, rien n’indique que le mandat respectif de ces sociétés d’État sera modifié.

Le gouvernement du Québec a créé la SGF en juillet 1962 afin de favoriser le développement économique de la province. Son mode d’intervention privilégié consistait en une participation directe au capital et à la création d’entreprises, notamment dans le secteur industriel, en collaboration avec des partenaires.

Tout récemment toutefois, au début de 2009, le gouvernement autorisait la SGF à consentir des prêts pour aider au financement d’entreprises pendant la crise financière; il lui a fourni 500 millions de dollars de capital additionnel à cette fin. Investissement Québec a, depuis longtemps, le mandat d’accorder des prêts aux entreprises. Cette situation peut avoir créé de la confusion chez les entreprises qui cherchaient du financement.

De prime abord, on peut donc considérer d’un bon oeil la fusion de la SGF et d’Investissement Québec, qui a comme objectif de mettre fin à ce dédoublement et d’épargner une dizaine de millions de dollars en frais de fonctionnement.

La SGF a subi des pertes une année sur trois depuis sa création. Toutefois, tant la fréquence que l’importance des pertes ont augmenté de façon substantielle au cours des 10 dernières années. Elle a perdu de l’argent durant six des 10 derniers exercices financiers, ce qui s’est traduit par un solde négatif de 1,07 milliard au cours de cette période.

Les fonds investis par le gouvernement du Québec ont totalisé 2,6 milliards en capital depuis le début. Au 31 décembre 2009, il ne restait que 1,8 milliard. La direction de la SGF a ainsi obtenu un rendement annuel négatif (-1,0%) sur le capital que lui a confié le gouvernement depuis sa création.

Investir dans la SGF entraîne bien plus de risques qu’en achetant des obligations du gouvernement du Québec. Pour compenser ce risque, un rendement acceptable devrait équivaloir, par exemple, à celui des entreprises cotées en Bourse. La Bourse de Toronto a procuré aux actionnaires un taux de rendement annuel moyen de 9,9% depuis 1962.

Si la direction de la SGF avait obtenu un tel rendement depuis 1962, ses avoirs se seraient élevés à 9,2 milliards au terme de 2009. La SGF a donc représenté un coût d’opportunité de 7,4 milliards pour les contribuables québécois, soit la différence entre la somme que l’on aurait obtenue en investissant à la Bourse le capital de la SGF depuis sa création et le montant restant au 31 décembre 2009.

La société d’État a investi dans sept des 100 plus grandes entreprises au Québec au cours des années: Bombardier, Cascades, Domtar, Rona, Saputo, Tembec et Transcontinental. Seule Rona a eu recours à un investissement de la SGF avant son inscription à la Bourse de Toronto. Tous ces fleurons de l’économie québécoise n’ont pas eu besoin de la SGF pour se développer. Lorsque la SGF est intervenue, c’était après que les entreprises eurent déjà atteint un stade de développement avancé. Cette influence demeure négligeable même si plusieurs entreprises ont vu le jour après la création de la société d’État.

Le rendement décevant de la SGF depuis sa création s’explique entre autres par le fait que son portefeuille forme un assemblage hétéroclite de placements sans fil conducteur. Que ce soit pour le cinéma ou les prêts aux entreprises, elle a investi des sommes considérables sans posséder une expérience pertinente du secteur.

Devant les résultats historiques peu concluants de la SGF, la conclusion qui s’impose est que le gouvernement devrait sérieusement songer à redéfinir le rôle du nouvel organisme résultant de la fusion annoncée avec Investissement Québec. Ce dernier devrait abandonner la partie de son mandat qui consiste à prendre des participations directes dans le capital d’entreprises.

Claude Garcia is an associate researcher with the Montreal Economic Institute and former president of Canadian operations at Standard Life.

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