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Lettre ouverte à Raymond Bachand

Mon cher Raymond,

Il semble que l’une des options que vous envisagez afin de rétablir l’équilibre budgétaire est l’augmentation de deux points de pourcentage de la TVQ. Mais permettez-moi de vous soumettre respectueusement d’autres pistes de solution. Elles tournent toutes autour du même thème: éliminer le déficit sans augmenter les impôts, les taxes et les tarifs.

En février dernier, l’IEDM publiait un Cahier de recherche préparé par Claude Garcia à propos d’Hydro-Québec. Notamment, il y expliquait que cette société d’État affichait en 2007 des bénéfices déclarés de 2,1 milliards de dollars alors qu’ils auraient pu être de l’ordre de 5 milliards de dollars. En résumé, voici comment il arrive à ce chiffre.

La première tranche de cette somme proviendrait d’économies sur le plan du fonctionnement. Par exemple, la proportion entre le nombre d’employés et le nombre de clients est beaucoup plus élevée chez Hydro-Québec qu’au sein des compagnies privées nord-américaines oeuvrant dans le secteur énergétique avec lesquelles on peut établir une comparaison. De plus, les frais pour le transport et la distribution sont de 486 $ par client pour la société d’État. Pour les autres, on parle de 293 $. Uniquement pour ce point, la somme de 747 millions de dollars serait épargnée. En tout et pour tout, un milliard de dollars pourraient être soustraits des coûts de fonctionnement.

La deuxième tranche, soit 1,1 milliard de dollars, proviendrait d’une meilleure gestion des investissements d’Hydro-Québec. Entre les budgets initiaux prévus pour la construction des centrales électriques et le coût final déboursé, un dépassement de 26 % a été observé en huit ans. Pour ce qui est du coût de production de l’électricité, le montant québécois atteint et dépasse le double de ce qui prévaut ailleurs en Amérique du Nord. Selon une estimation prudente, une réduction globale de 25 % des dépenses reliées aux investissements est possible. Et il y a d’autres exemples. Par contre, pour être juste envers Hydro-Québec, son rendement relatif est meilleur que celui d’Hydro One en Ontario.

Une autre piste de solution est celle exposée par mes collègues Marcel Boyer et David Descôteaux, à savoir la mise en place de la concurrence dans les services publics. Il ne s’agit pas ici de l’éternel débat «privé versus public», mais bien de transformer une situation de monopole en situation de concurrence. Par exemple, la ville d’Indianapolis en est arrivée à obtenir des économies de l’ordre de 118 millions de dollars dans le secteur des travaux publics. La recette? Soumettre l’entretien des rues de la ville à un appel d’offres. Dans ce cas précis, il est particulièrement intéressant de noter que se sont en fait les cols bleus de la ville d’Indianapolis qui ont empoché la grande majorité des contrats! Forts de leur expertise sur le terrain, ils ont en effet été capables d’offrir un rapport qualité-prix meilleur que les entreprises privées qui leur faisaient compétition. Mais la concurrence leur a donné les incitations voulues et la nécessaire flexibilité pour revoir en profondeur leurs façons de faire.

L’État québécois, comme employeur, devrait s’inspirer de cette approche. On me rétorquera que les syndicats vont s’y opposer bec et ongles. Cela est en effet très probable, mais un choix devrait leur être donné: ou bien ils collaborent activement à un véritable changement de cap fondé sur la mise en concurrence et la culture de l’efficience ou bien un gel de salaire de quatre ans leur est imposé par décret. Lors de mon mandat au Conseil du patronat du Québec, j’ai eu l’occasion d’interagir sur une base régulière avec des fonctionnaires. J’en suis arrivé à la conclusion qu’ils sont, pour la plupart, dévoués, travaillants et compétents. Je ne vois pas pourquoi ils ne seraient pas capables de générer des résultats comparables à ceux d’autres fonctionnaires dans le monde qui ont dû réaliser des gains de productivité dans le contexte de réformes semblables.

Michel Kelly-Gagnon is President and CEO of the Montreal Economic Institute.

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