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Le triomphe de l’émotion sur la raison

Pendant que la planète pleurait la mort de Michael Jackson, la nouvelle administration, qui avait pourtant promis d’être un modèle en matière de transparence, a adopté en toute hâte la loi Waxman-Markey sur le plafonnement et l’échange d’émissions de GES (Cap and Trade) sans que personne n’ait lu le texte de 1500 pages.

Mais faut-il en être surpris? Après tout, n’est-ce pas cette même administration qui a accepté également de dépenser 787 milliards $ en faveur d’un plan de relance de 1000 pages dont personne n’avait pris connaissance?

Pour justifier son empressement, Washington invoque l’urgence de lutter contre les changements climatiques. Pourtant, la température a diminué depuis 1998, et plus de 35 000 scientifiques mondialement reconnus contestent la contribution de l’activité humaine à l’augmentation des CO2. Mais cela semble insuffisant pour inciter Washington à reconsidérer sa politique environnementale. À moins que ce ne soit précisément la croissance rapide du nombre de sceptiques qui motive la Maison Blanche à agir vite avant que le mouvement de contestation ne paralyse son agenda.

Et puis, pourquoi un texte de 1500 pages? Ne pouvait-on pas exprimer cette loi en quelques pages? Pour être aussi long, elle doit certainement contenir une série d’exceptions, de cas particuliers et, surtout, de privilèges spéciaux. Or, ceci ouvre la voie aux traitements de faveur et à la corruption, autant de comportements qui ne peuvent que nuire au bon fonctionnement de l’économie.

Comme cette loi permet à l’Oncle Sam d’imposer des tarifs douaniers sur les importations en provenance de pays qui n’imposent pas des normes environnementales similaires, Ottawa risque de se sentir forcé d’emboiter le pas afin d’éviter une guerre commerciale. Mais cette loi est coûteuse. Elle constitue la plus importante augmentation d’impôt de l’histoire des États-Unis. Chaque ménage devra débourser entre 1500$ et 3000$ de plus annuellement pour ses besoins énergétiques uniquement. À cela, il faut ajouter les coûts importants que devront supporter les entreprises, et qui seront très certainement refilés aux consommateurs.

En revanche, Barack Obama promet que cette loi permettra la création de nombreux «emplois verts» et cite en exemple le modèle espagnol dont il s’est inspiré. Or, le professeur espagnol Gabriel Calzada de l’Universidad Rey Juan Carlos, a récemment publié une étude sur les coûts qu’une telle politique environnementale a occasionnés à son pays. Il conclut que la création d’«emplois verts» n’est que temporaire, mais excessivement coûteuse: entre 752 000$ et 1,4 million $ pour chaque emploi créé. Il constate également que chaque «emploi vert» fait disparaître 2,2, emplois traditionnels.

Malgré tout, Washington défend la politique de plafonnement et d’échange, car elle contribuerait à sauver la planète. Or, en se basant sur le modèle MAGICC (Model for the Asessment of Greenhouse-gas Induced climate Change) employé par Washington, l’adoption d’une telle loi permettrait de réduire la température d’à peine 0.2ºF d’ici 2100. Quand on sait que les variations annuelles et naturelles de la température moyenne sont du même ordre, les résultats ne peuvent qu’être décevants.

Même dans l’hypothèse extravagante où tous les pays qui ont ratifié Kyoto adoptent une loi identique à celle concoctée par Washington, la température diminuerait de 0.4ºF d’ici la fin du siècle: un effort titanesque pour un résultat insignifiant.

Que l’activité humaine soit responsable ou non des émissions de CO2, la protection de l’environnement demeure une valeur universelle incontestable. Toutefois, la loi Waxman-Markey est difficilement justifiable. Son adoption atteste du triomphe de l’émotion sur la raison. Espérons qu’Ottawa fera preuve de plus de sagesse!

Nathalie Elgrably-Lévy is Senior Economist at the Monreal Economic Institute.

* This column was also published in Le Journal de Québec.

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