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Textes d'opinion

Même les partisans de Québec solidaire paient assez d’impôt

L’organisme pour lequel je travaille publie aujourd’hui un sondage sur les baisses d’impôt annoncées par le gouvernement Couillard lors de sa mise à jour économique de novembre dernier.

Les réponses sont très intéressantes. Je les partage avec vous en résumant un peu les questions (le rapport du sondage est disponible en entier ici).

Question 1. L’annonce récente des baisses d’impôt par le ministre Leitão est-elle positive ou négative?

Ce sont 63 % des répondants qui disent que c’est positif. Les partisans de la CAQ, du PLQ et du PQ trouvent tous majoritairement qu’il s’agit d’une bonne nouvelle, de même que 42 % de ceux qui appuient Québec solidaire. En tout, seulement 26 % des Québécois n’y voient pas matière à réjouissance.

Question 2. Pensez-vous que les baisses d’impôts sont bonnes pour l’économie?

Encore ici, le verdict est sans équivoque : 59 % disent que oui, 27 % disent que non. Les appuis par parti sont semblables à ceux pour la question 1.

Allons maintenant à la question 3, que j’aime particulièrement.

Question 3. Est-ce que vous trouvez que vous payez : trop d’impôts? Juste assez d’impôts? Pas assez d’impôts?

La réponse est claire : 67 % des Québécois trouvent qu’ils paient « trop » d’impôts et 25 % disent en payer « juste assez ». Seulement 2 % disent ne pas payer assez d’impôts.

C’est quand même assez intéressant, quand on considère qu’un peu plus du tiers des contribuables ne paient pas d’impôt sur le revenu (ils paient de l’impôt indirect cependant, comme les taxes à la consommation).

Maintenant, mon chiffre préféré : 91 % des partisans de Québec solidaire considèrent qu’ils paient « trop » ou « assez » d’impôts. Plus précisément, 44 % trouvent qu’ils en paient « trop », et 47 % disent qu’ils en paient « juste assez ». Seulement 6 % de ceux qui appuient Québec solidaire trouvent qu’ils ne paient pas assez d’impôt.

C’est-y assez fort? Même chez les partisans les plus fervents d’un plus gros État, la limite est atteinte!

Mais, docteur, un autre sondage, publié il y a quelques jours, a pourtant laissé entendre que les Québécois seraient « aux deux tiers (66 %) plus favorables à un réinvestissement en santé ou en éducation, pour les familles ou les aînés, qu’à une éventuelle baisse d’impôt pour les particuliers (34 %) ».

Qui dit vrai? Les deux. À mon avis, ça dépend de comment on comprend la question.

Dans cet autre sondage, on pose le problème de la façon suivante :

À laquelle des options suivantes êtes-vous le plus favorable?

-Un réinvestissement en santé, en éducation, pour les familles et pour les aînés? (66 %)

-Une baisse d’impôt pour les particuliers? (34 %)

Il semble y avoir une contradiction directe avec notre propre sondage, qui a d’ailleurs été réalisé par la même firme (au début janvier, avant l’autre), mais ce n’est qu’en surface.

Si on pouvait vous procurer la certitude que nos hôpitaux seraient à la hauteur de nos attentes – plutôt que de nous faire attendre –, et qu’on cessait de nous arroser de mauvaises nouvelles de salles d’urgence congestionnées, d’écoles délabrées, de taux de réussite décourageants, de grands-mères et de grands-pères laissés dans leurs souillures, je suis certain que vous choisiriez ça. Moi aussi.

Même mon collègue le plus favorable aux baisses d’impôts choisirait ça (j’ai vérifié). Et je crois que c’est ainsi que la plupart des gens qui ont choisi l’option de « réinvestissement » l’ont comprise : j’ai le choix entre enfin régler les problèmes ou recevoir quelques centaines de dollars que je m’étais habitué à ne plus avoir? Réglez les problèmes!

Malheureusement, tout ça reste un souhait, à moins de vivre au pays des licornes. Cela fait des années que les gouvernements dépensent de plus en plus dans les services publics, notamment la santé et l’éducation, et les améliorations se font encore attendre.

Ce qui nous amène à la dernière question de notre sondage :

Question 4. Croyez-vous que les sommes additionnelles injectées depuis 10 ans par le gouvernement du Québec en santé et en éducation ont donné des résultats?

Le verdict, encore une fois, est sans appel : 71 % des Québécois croient que non. Les partisans de Québec solidaire ne sont pas dupes, et répondent de façon semblable (83 %). Comme quoi les Québécois, même s’ils sont d’un naturel optimiste, ne croient plus aux licornes.

P.S. On se reparlera une autre fois des solutions. Il y en a plein, et c’est faux de laisser entendre que ça doit obligatoirement coûter plus cher.

Patrick Déry est analyste en politiques publiques à l’Institut économique de Montréal. Il signe ce texte à titre personnel.

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