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Textes d'opinion

Netflix: régler le problème d’équité en réduisant le fardeau fiscal

Le débat sur la « taxe Netflix » a connu deux dénouements ces derniers jours. D’une part, alors que les services canadiens équivalents, comme ceux de Vidéotron et de Bell, doivent percevoir les taxes de vente, Ottawa crée une situation inéquitable évidente en exemptant les services de Netflix. D’autre part, en choisissant d’imposer la TVQ, Québec augmente, dans les faits, le fardeau fiscal des Québécois. Ces solutions sont toutes deux loin d’être idéales.

La difficulté d’appliquer nos taxes à des entreprises étrangères n’est pas un enjeu. Les très grandes entreprises américaines se plient généralement aux fiscalités locales sans trop de difficulté. Netflix l’a fait ailleurs, notamment en Australie, et a déjà indiqué qu’elle collaborerait avec le gouvernement du Québec.

Le cœur du débat est plutôt ailleurs : en cherchant à harmoniser la fiscalité pour régler des problèmes d’équité, les gouvernements devraient-ils recourir à des solutions qui augmentent ou qui réduisent le fardeau fiscal?

Les plus lourdement taxés

On le sait, les Québécois sont parmi les plus lourdement taxés en Amérique du Nord et même parmi les pays développés. Cette réalité réduit la compétitivité de notre économie et nous appauvrit. Clairement, il serait préférable de viser une réduction du fardeau fiscal.

La concurrence fiscale avec les autres pays contribue à empêcher que nos taxes soient encore plus élevées. C’est par exemple probablement en partie parce que les taxes de vente sont inexistantes ou beaucoup moins élevées dans les États voisins que le gouvernement Couillard s’est abstenu d’augmenter la TVQ, comme le proposait la commission Godbout.

De la même façon, sans la soupape de sûreté que constituent les boutiques en ligne étrangères, les taxes de vente seraient probablement déjà plus élevées partout au Canada.

Bien qu’il soit relativement facile d’exiger de grandes entreprises qui ont une réputation à défendre, comme Netflix ou Amazon, qu’elles perçoivent nos taxes de vente, il sera beaucoup plus difficile, et surtout coûteux pour les gouvernements, de contrôler ce que font les PME de partout dans le monde, qui sont moins susceptibles de se plier volontairement à notre fiscalité. Or, l’Internet est là pour rester et nous n’en sommes encore qu’aux premières expériences dans un secteur qui va tout bouleverser.

Pourquoi toujours harmoniser vers le haut?

La solution de l’harmonisation par la hausse du fardeau fiscal retarde non seulement l’adoption d’une solution de long terme, s’appliquant de la même façon pour tous, mais crée aussi un avantage évident pour ces nouveaux entrants étrangers, qui auront la voie libre pour proposer un prix plus faible.

En d’autres mots, la solution d’Ottawa, de ne pas taxer Netflix, mais de continuer à taxer tous les autres, crée une situation inéquitable. Mais taxer Netflix, comme Québec entend le faire, encourage directement l’émergence de nouveaux joueurs, assez petits et futés pour éviter les taxes de vente. Le débat va se poursuivre d’une façon ou d’une autre.

Il est difficile de ne pas faire le lien avec la réforme de la fiscalité des petites entreprises qui, selon le ministre des Finances Bill Morneau, vise à réduire certaines iniquités du système fiscal en augmentant le fardeau fiscal global.

Il existe une troisième solution, qui n’est pas non plus parfaite pour différentes raisons, mais qui a le mérite d’éviter les pièges dans lesquels tombent les solutions d’Ottawa et de Québec. Il est possible de mettre sur un pied d’égalité Netflix, Illico, Crave et tous les autres services de contenu en ligne en les exemptant tous des taxes de vente.

On règlerait ainsi l’essentiel du problème, tout en réduisant le fardeau fiscal des Canadiens au lieu de l’augmenter. Qui plus est, cette solution faciliterait la transition de la télévision et des médias canadiens vers les nouvelles plateformes.

L’harmonisation se fait trop souvent par la hausse du fardeau fiscal, plutôt que par des politiques qui libèrent la création de richesses. Les deux gouvernements devraient accorder leurs violons en ce sens.

Mathieu Bédard est économiste à l’Institut économique de Montréal. Il signe ce texte à titre personnel.

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