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Textes d'opinion

Les gens préfèrent une société juste… et inégale

À écouter certains médias, politiciens ou même le pape, on serait tenté de croire que réduire les inégalités économiques et redistribuer de la richesse des plus fortunés vers les plus démunis constituent le combat du siècle. Ce n’est pourtant pas l’avis de l’ensemble de la population, comme le montre une étude fort intéressante parue en avril dernier. 

Des chercheurs en psychologie de l’université Yale y vont de conclusions qui peuvent étonner à première vue : 

  • Il n’existe pas de preuves montrant que les gens en général sont préoccupés par les inégalités économiques.
  • Ce qui leur importe est plutôt que le système économique soit juste et équitable, et qu’il récompense les gens au mérite, selon leurs efforts. Cette « justice économique » est souvent confondue avec le concept de « réduction des inégalités ».
  • Les gens accordent plus d’importance à une distribution juste et équitable des revenus qu’à une distribution égale. Et s’il faut choisir entre les deux, les gens préfèrent une « inégalité juste » à une « égalité injuste ».

En d’autres mots, ce sont les occasions de s’enrichir qui comptent – et qui doivent être accessibles à tous – et non la distribution de la richesse.

Bonne nouvelle, le Canada est justement un endroit où les opportunités de mobilité sociale sont nombreuses! Une étude toute récente de Statistique Canada montre d’ailleurs que la mobilité sociale est en hausse au Canada.

En effet, contrairement aux idées reçues, les Canadiens qui se trouvent au bas de l’échelle des revenus n’y demeurent pas longtemps. Seulement 13 % de ceux qui se trouvaient dans le quintile des revenus les plus faibles en 1990 – incluant des étudiants et jeunes adultes – s’y trouvaient toujours en 2009, selon une banque de données de Statistique Canada.

Aussi, non seulement les pauvres s’enrichissent au Canada, mais ils se sortent de la pauvreté de plus en plus vite. Seulement 3,6 % de l’ensemble des Canadiens sont restés sous le seuil de faible revenu pendant les six années de la période 1993-1998, et cette proportion a chuté à 1,5 % pour la période 2005-2010.

Comme nous le constatons dans notre propre étude, ce qui compte, ce n’est pas le nombre de riches ou de pauvres à un moment précis, mais plutôt que ceux se trouvent au bas de l’échelle des revenus ne soient pas prisonniers de leur statut, et que leurs enfants ne soient pas condamnés à y rester. Et je suis heureux de voir qu’une majorité de gens, selon l’étude de Yale, comprennent cela.

Pourrait-on faire encore mieux? Oui, en adoptant des politiques publiques qui favorisent la liberté économique pour tous et la création de richesse. Ce qui permet aux Canadiens d’éviter de stagner dans la pauvreté, c’est la possibilité d’avoir un emploi. Pour ce faire, il faut enlever les embûches administratives et réglementaires qui nuisent à l’entrepreneuriat, à l’investissement et à la croissance économique en général.

Et il faut surtout comprendre que la création de richesse ne passe pas par des programmes bureaucratiques de l’État, qui coûtent cher et qui finiront par nécessiter des hausses de taxes, ralentissant du coup les investissements et l’entrepreneuriat.

Lorsque des gens en situation de pouvoir choisissent de « redistribuer » la richesse selon ce qu’ils croient approprié, ceci est d’ailleurs en contradiction avec le concept de justice économique tel que le conçoivent une majorité de gens, et n’a strictement rien à voir avec la véritable création de richesse.

Michel Kelly-Gagnon est président et directeur général de l’Institut économique de Montréal. Il signe ce texte à titre personnel.

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