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Textes d'opinion

Le problème, c’est le contrôle des loyers

Le gouvernement de l’Ontario a récemment annoncé de nouvelles politiques afin de calmer son marché immobilier, imposant une taxe de 15% aux acheteurs étrangers semblable à celle adoptée en Colombie-Britannique en 2016, en plus d’élargir les mesures de contrôle des loyers. À Montréal, l’opposition demande à la Ville de suivre la voie tracée par ces deux provinces.

Le ministre des Finances du Québec, Carlos Leitão, s’est montré peu enclin à intervenir dans le marché, avec raison. C’est précisément ce genre de politique qui contribue au problème.

Des prix élevés depuis plus de 50 ans

Les prix des maisons sont élevés dans des villes comme Toronto et Vancouver depuis longtemps, bien avant que l’on s’inquiète de l’arrivée d’acheteurs étrangers. En fait, dans ces deux villes, les politiques de zonage et d’aménagement du territoire font grimper le prix de l’immobilier depuis plus de 50 ans. 

Les économistes et les urbanistes sont bien conscients des effets de ces politiques et de celles dites de « croissance intelligente » (smart growth), qui ont toutes pour conséquence de réduire la disponibilité du logement. Lorsque ces politiques deviennent trop restrictives, les coûts pour se loger explosent et les plus pauvres sont les premiers touchés, puisque la construction d’habitations abordables est alors remplacée par celle de logements plus luxueux. Ce phénomène de gentrification est présent à Toronto, Vancouver et Montréal depuis déjà un certain temps.

En ce qui a trait spécifiquement au contrôle des loyers, le fait d’imposer des limites à leur augmentation aide évidemment un certain nombre de locataires, mais il rend les logements à louer moins rentables pour les propriétaires. Par conséquent, il s’en construit moins, ce qui fait augmenter les loyers pour beaucoup d’autres locataires.

Comment détruire une ville

Ceux qui conservent leur appartement pour une longue période de temps peuvent en profiter, mais pour les autres qui emménagent dans un nouveau logement, les prix se trouvent à augmenter plus vite en raison d’une offre qui est artificiellement limitée. Le contrôle des loyers aggrave donc le problème sous-jacent. Comme l’a dit l’économiste suédois Assar Lindbeck, « mis à part un bombardement, le contrôle des loyers semble dans bien des cas être la technique connue la plus efficace pour détruire des villes ».

Montréal a eu droit à sa part de mauvaises politiques de logement, mais son marché immobilier n’est aucunement comparable à celui de Toronto ou de Vancouver. Et bien que l’on puisse débattre de l’impact des acheteurs étrangers sur les prix dans la région de Vancouver, les données sont beaucoup moins concluantes pour ce qui est de Toronto. Dans le cas de Montréal, cet épouvantail ne peut même pas être évoqué, puisque de tels achats représentent moins de 1 % des transactions. En tous les cas, une taxe s’appliquant aux acheteurs étrangers n’est pas une solution à nos mauvaises politiques publiques.

Le taux d’inoccupation à Montréal est également élevé et stable à 3,9 %, comparativement à 1,3 % pour Toronto et 0,7 % pour Vancouver. L’augmentation annuelle du prix des maisons, elle, a atteint 31,7 % pour le Grand Toronto et 11,4 % pour le Grand Vancouver à la fin avril 2017. Celle à Montréal était de 3,7 %. S’il y a un problème à Montréal, c’est le manque d’investissement dans le logement abordable qui, encore une fois, est dû en partie au contrôle des loyers.

Le coût de la vie dans des villes comme Vancouver et Toronto sera toujours élevé. Beaucoup de gens veulent vivre dans les grandes villes, puisque ces endroits sont souvent des centres économiques importants, qui regorgent d’opportunités. Les mauvaises politiques du passé n’ont pas seulement échoué à régler le problème, elles l’ont empiré. Étendre ou élargir ces mesures ne fera qu’entraîner à nouveau les mêmes conséquences néfastes dans l’avenir.

Au lieu de laisser une offre artificiellement limitée faire grimper les prix et chasser les pauvres des villes, les gouvernements devraient laisser le mécanisme de prix faire son travail, ce qui inciterait les développeurs à construire davantage lorsque les prix augmentent. Enfin, il serait mieux avisé de soutenir de façon ciblée ceux et celles qui sont réellement dans le besoin que de fausser le marché avec des mesures bien intentionnées, mais contreproductives.

Mathieu Bédard est économiste à l'Institut économique de Montréal et l'auteur de « Immobilier : le problème est le contrôle des loyers et non les acheteurs étrangers ». Il signe ce texte à titre personnel.

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